La Vérité toute nue
La Vérité toute nue
Source le Saker Francophone
Ce petit livre est à la fois un résumé et une synthèse de son livre précédent, Les raisons cachées du désordre mondial, toujours aux éditions Sigest. Il est aussi un éclairage percutant de la situation géopolitique globale actuelle. En 100 pages, dans un format poche, ce livre vous permettra de profiter d’un large survol de la pensée de l’auteure, qu’elle développe par ailleurs depuis de nombreuses années sur notre blog et dans le livre cité ci-dessus qui est le développement de cette synthèse.
Si vous êtes déjà bien averti, vous pourrez profiter de ce condensé pour en parler autour de vous, texte en main ou pour l’offrir à vos amis et leur laisser l’occasion de monter en gamme. Sinon c’est un excellent marche-pied pour faire un large tour d’horizon des sujets importants à appréhender pour vous faire une meilleure idée de la réalité de notre monde. Pour moins de 10€, il ne faut pas hésiter à le diffuser et à partager les connaissances accumulées par Mme Bugault.
Sur le fond, ce livre appuie l’idée d’un changement de repère orthonormé des analyses de géopolitiques que 95% des analystes ne prennent pas en compte ! Les États ne comptent plus, du moins en Occident, dans la plupart des pays africains, et dans la plupart des pays du Golfe ainsi qu’en Amérique latine et sûrement aussi dans certains pays d’Asie.
Les véritables décideurs ne sont plus les États mais les puissances financières anonymes. Les géopolitologues continuent à faire comme si nous étions dans une ou des luttes d’État à État ! Leurs analyses sont donc, par essence, faussées, tronquées…
L’auteur pousse donc son analyse dans ses retranchements. Les peuples vont-ils laisser la situation se dégrader doucement, avec une mainmise totale sur nos vies et le retour à des formes d’esclavages assumées ou, comme en France avec les Gilets Jaunes, vont-ils pousser pour récupérer leur droit à s’autodéterminer en fonction de leur différents intérêts collectifs qu’il faudra juridiquement déterminer.
Avec ce texte, en bonus, l’auteur a ajouté un lexique très complet des acronymes et des définitions dont vous aurez besoin pour naviguer dans le grand jeu géopolitique de ce début de 21ème siècle. De la loi Le Chapelier, à la BRI, en passant par Bretton Woods, ce lexique est un excellent accélérateur de connaissances historiques, économiques et financières.
Pour accompagner cette note de lecture, on vous propose cette interview de l’auteur sur TV Liberté, datée du 6 Janvier 2020.
Quelles institutions politiques face au Nouvel ordre mondial ? - Poléco n°244 avec Valérie Bugault
L'INTÉGRALITÉ DE NOS ÉMISSIONS EST SUR ET SEULEMENT SUR TVLIBERTES.COM Face au projet de Nouvel ordre mondial promis par les dirigeants des sociétés occidentales, des voix s'élèvent et propo...
Aujourd'hui, le ministre des affaires étrangères russe, S. Lavrov est attendu aux Etats Unis pour sa visite réponse à Tillerson. Cet évènement se déroule dans un contexte particulier, celui de la subite démission de ses fonctions du chef du FBI par D. Trump.
Ce 10 mai 2017, Sergueï Lavrov va rencontrer son homologue américain Rex Tillerson pour continuer à oeuvrer à la restauration des relations russo-américaines, comme l'avaient décidé les deux Présidents russe et américain lors de leur entretien téléphonique la semaine dernière. La question de la Syrie sera au évidemment coeur des discussions, ainsi que la lutte contre le terrorisme.
A cette occasion, S. Lavrov sera reçu par le Président américain, l'information a été confirmée par la Maison Blanche. Ce geste politique de D. Trump est particulièrement significatif dans le contexte de russophobie hystérique qui règne aux Etats Unis en ce moment, chaque contact avec l'ambassadeur russe est considéré comme une trahison.
Rappelons que l'équipe du nouveau Président est sous le coup d'une enquête menée par le FBI pour justement établir les liens entre les proches de Trump avec la Russie, ce qui a toujours été contesté et par la Maison Blanche et par le Kremlin. Le chef du FBI, James Comey, a officiellement reconnu l'existence d'une telle enquête en mars. La première enquête de janvier avait déjà déçu, aucune preuve réelle n'ayant été apportée (voir notre article ici). En mai, la situation ne s'est pas améliorée: lors de l'audition de J. Comey devant le Congrès, aucune nouvelle preuve n'a été produite, ce qui n'empêche pas le chef du FBI d'affirmer que pour autant V. Poutine soutenait Trump car il ne supporte pas Clinton.
C'est dans ce contexte que D. Trump vient de décider de renvoyer J. Comey de ses fonctions. Selon la Maison Blanche, le renvoi de Comey n'est pas lié à l'enquête sur les liens avec la Russie, mais au fait qu'il n'est pas apte à remplir ses fonctions. Rappelons que J. Comey a été mis en place par Obama. C'est peut-être pour cela qu'il a si rapidement fermé l'enquête contre H. Clinton au sujet de ses e-mails. Ce serait surtout pour cette raison qu'il a été démis de ses fonctions. A l'occasion de ses enquêtes, il est également accusé d'avoir violé les règles, de n'avoir pas suivi le ministère de la justice dont il dépend. Et c'est sur recommandation du ministère de la justice que D. Trump l'a démis de ses fonctions:
President Trump fired FBI Director James B. Comey on Tuesday, at the recommendation of senior Justice Department officials who said he had treated Hillary Clinton unfairly and in doing so damaged the credibility of the FBI and the Justice Department.
Evidemment, l'évènement surprise a provoqué une série de critique contre Trump. Même de la part du leader des démocrates qui déclarait encore il y a peu ne plus lui faire confiance. Les républicains, quant à eux, ont des doutes sur le bien-fondé de la décision, même Snowden parle d'une ingérence politique grave. L'accusation d'ingérence est assez amusante, puisque le chef du FBI a été nommé par Obama, dont le clan a perdu les élections et qui fait pression sur la nouvelle administration.
Le calendrier est intéressant, car cela tombe juste au moment de la visite de S. Lavrov aux Etats Unis. Justement quand D. Trump déclare recevoir le ministe russe des affaires étrangères. Comme si D. Trump avait eu une réaction salutaire pour tenter de repousser l'étau dans lequel on veut le contraindre, un cadre qui empêche toute possibilité de coopération avec la Russie.
Publié par Karine Bechet-Golovko
Repris sur comité Comité Valmy
Les luttes politiques à Washington ont gêné les plans de nouvelle détente avec la Russie du président Trump, mais ont également laissé le champ de bataille mondial ouvert, ce qui permet aux Russes – et aux Chinois – d’étendre leur influence, nous explique Gilbert Doctorow.
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Alors que les démocrates et les principaux médias des États-Unis se concentrent avec ferveur sur des accusations encore non prouvées d’ingérence russe dans les élections pour expliquer la surprenante défaite d’Hillary Clinton, cette fureur a contraint un président Trump aux abois à renoncer à ses projets de coopération avec la Russie.
Au milieu de cette hystérie anti-russe, les membres du Cabinet de Trump et l’ambassadeur des Nations Unies ont fait de leur mieux pour réitérer les positions politiques intransigeantes de l’administration Obama à l’égard de la Russie, soulignant que rien n’avait changé. Pour sa part, le Congrès a plongé dans un McCarthysme visant les partisans de Trump qui auraient rencontré des Russes avant les élections de 2016.
Pendant ce temps, le Kremlin observe ce qui se passe à Washington. À Moscou, le changement de relations avec les États-Unis que certains avaient espéré est maintenant considéré comme improbable. Par contre, le fait que les États-Unis se déchirent dans leurs combats partisans donne à la Russie un bol d’air frais bien nécessaire, qui la soulage de la pression continue de l’Occident à laquelle elle a été soumise au cours des trois dernières années.
Les élites russes s’expriment de plus en plus sur la façon dont elles envisagent de procéder sur la scène internationale, dans ces nouvelles circonstances. Le mot d’ordre est l’autosuffisance et la poursuite des politiques régionales et mondiales qui ont commencé à se former au cours des deux dernières années, au fur et à mesure que la confrontation avec les États-Unis s’est intensifiée.
Ces politiques n’ont rien à voir avec une attaque contre les États baltes ou la Pologne, scénarios de cauchemar poussés par les néoconservateurs et les interventionnistes libéraux aux États-Unis et dans l’Union européenne. Les plans russes n’ont rien à voir avec la subversion des élections en France ou en Allemagne, une autre histoire sortie de l’imagination fiévreuse occidentale.
Au lieu de cela, les Russes se concentrent sur leurs capacités de défense de la nation et leurs alliances politiques en plein essor, avec la Chine et une foule de pays asiatiques qui, ensemble, peuvent s’opposer au pouvoir de l’Occident. Il est important de comprendre que la vision russe est celle d’un futur monde multipolaire et non un retour au système bipolaire des deux superpuissances datant de la guerre froide, que les élites russes considèrent comme inaccessible, compte tenu de la répartition du pouvoir à travers le monde et des ressources limitées de la Russie.
En d’autres termes, les Russes envisagent un futur ordre mondial dont les grandes lignes remontent au dix-neuvième siècle. En ce qui concerne les détails, les Russes sont maintenant indissolublement liés à la Chine, pour des raisons d’intérêt économique et de sécurité sur la scène mondiale. Il en va de même de leurs relations avec l’Iran, au niveau régional du Grand Moyen-Orient.
Les élites russes sont également fières des relations militaires, économiques et géopolitiques en train de prendre forme avec des pays aussi éloignés que la Libye, l’Égypte, la Turquie, le Pakistan et la Thaïlande [les Philippines aussi, qui viennent d’octroyer à la marine russe le libre accès à leurs eaux territoriales et leurs ports, NdT]. Les informations sur les percées avec chacun de ces pays sont annoncées quotidiennement dans les émissions de télévision russes.
Les élites russes ont bien remarqué que les États-Unis avaient mal compris la position de Moscou en Syrie depuis le début de la guerre. La priorité de la Russie n’a jamais été de maintenir le régime d’Assad au pouvoir, mais plutôt de conserver sa position au Moyen-Orient. La Russie était déterminée à maintenir sa base navale à Tartus, qui est importante pour soutenir la présence de la Russie en Méditerranée orientale. Plus largement, l’objectif de Moscou était de rétablir l’influence russe dans une région stratégique où la Russie était autrefois un acteur important, avant l’effondrement de l’Union soviétique.
La perte de l’Europe de l’Est n’est pas oubliée en Russie, même si l’hégémonie américaine est reconnue comme une réalité du présent. Mais rien ne dure toujours, et les Russes s’attendent à être de retour, en tant que force majeure dans la région, non par la conquête militaire, mais par une logique économique et stratégique qui les favorise à long terme. Bien que de nombreuses élites d’Europe de l’Est aient été rachetées par les États-Unis et l’Union européenne, de nombreux citoyens ont été les principaux perdants de l’ordre états-unien post-Guerre froide, souffrant de la désindustrialisation et de l’émigration à grande échelle dans les pays européens plus développés, atteignant jusqu’à 25 % de la population dans certains endroits. Ces pays d’Europe de l’Est ont peu à offrir à l’Europe occidentale, sauf comme destinations touristiques, alors que leur potentiel commercial avec la Russie est immense.
Le week-end dernier, la télévision russe a diffusé des images de manifestations en Pologne, en Bulgarie, en Roumanie et en Moldavie que vous n’avez pas vues sur Euronews. L’objet de cette colère populaire était le spéculateur financier milliardaire George Soros et ses affiliés de l’« Open Society« . Le journaliste russe a expliqué que ces manifestations – opérant sous la bannière de « Soros Go Home » – sont devenues possibles maintenant, parce que l’administration Trump l’a laissé tomber.
Il serait naïf de ne pas voir une certaine assistance officielle russe à ces manifestations coordonnées dans une grande partie de l’Europe de l’Est, mais les Russes renvoient simplement aux États-Unis la monnaie de la pièce, puisque ces « organisations non gouvernementales » états-uniennes sont très occupées à subvertir les gouvernements légitimement euro-sceptiques de ces pays, en coopération avec celles de Soros.
Mais il y a des différences essentielles, entre ce qui se passe maintenant et du temps de la Guerre froide. La Guerre froide initiale n’était pas uniquement caractérisée par la rivalité militaire et géopolitique entre les deux superpuissances mondiales, les États-Unis et l’Union soviétique. Il s’agissait aussi d’une rivalité idéologique entre, d’un côté, le capitalisme de marché libre et la démocratie parlementaire et, de l’autre, les économies planifiées et le régime monolithique du Parti communiste.
Pendant la présidence Nixon, une politique de détente a été mise en place, qui a incarné un principe de coexistence entre ces principes concurrents d’organisation de la société humaine, dans l’intérêt de la paix mondiale. Il y en a qui soutiennent que nous n’avons pas de Nouvelle Guerre froide aujourd’hui, parce que la dimension idéologique manque, bien qu’il y ait des différences de principes évidents entre les U.S./E.U, socialement libéraux, et une Russie plus socialement conservatrice. Mais ces différences ne constituent pas un véritable conflit idéologique.
Le vrai champ de discorde est la façon dont chaque partie conceptualise aujourd’hui la gouvernance mondiale. À ce niveau, il est logique de parler d’un clivage idéologique, parce qu’il existe un vaste corpus de pensée pour étayer ces opinions concurrentes, qui incluent : la globalisation contre l’État souverain ; la politique étrangère fondée sur les valeurs opposée à la politique étrangère fondée sur les intérêts ; un ordre global établi par la victoire totale de la démocratie libérale sur toutes les autres formes de gouvernance nationale ou un équilibre des forces et un respect des différences locales ; l’idéalisme contre le réalisme. L’Occident a généralement favorisé les premières options, tandis que la Russie et la Chine dirigent un bloc de nations favorisant généralement les deuxièmes options.
Pendant sa campagne et dans son discours inaugural, Donald Trump a parlé en termes réalistes, suggérant que les États-Unis abandonneraient leur idéologie idéaliste des 25 années précédentes, qui impliquait des stratégies coercitives de « changement de régime » pour imposer les valeurs politiques et les systèmes économiques occidentaux dans le monde. Au lieu de cela, Trump a suggéré qu’il ferait des affaires avec la Russie et avec le monde dans son ensemble sans imposer des solutions américaines, en acceptant essentiellement les principes dont les russes font la promotion depuis leur opposition publique aux États-Unis, en 2007.
Toutefois, étant donné le recul de Trump sur la politique étrangère ces dernières semaines – sous les féroces attaques des centres de pouvoir de Washington, affirmant une collusion possible entre la campagne Trump et la Russie – nous pourrions nous retrouver avec quelque chose ressemblant au nouveau départ qu’Obama à cherché à mettre en place au début de son mandat en 2009, mais qui n’a jamais été aussi loin qu’une détente/coexistence. Il est resté limité à la coopération dans des régions isolées, où les intérêts des États-Unis et de la Russie étaient censés coïncider.
La seule différence que nous pourrions constater de la part d’une administration Trump bien coincée, est un moindre penchant pour les opérations de changement de régime et une reprise de quelques contacts bilatéraux avec la Russie, qui ont été interrompus quand Obama a décidé de pénaliser la Russie pour son intervention en Crimée et dans le Donbass en 2014.
En supposant que les Républicains néocons et les Démocrates va-t-en-guerre de Washington ne mettent pas Trump dans une situation politique désespérée, il pourrait au moins engager des relations avec Moscou sur un ton plus poli et diplomatique. Cela pourrait être mieux que ce qu’envisageait Clinton, mais ce n’est certainement pas le début d’un nouvel âge d’or collaboratif.
Le recul des objectifs de bonne relation entre l’administration Trump et la Russie est logique, en raison d’une autre réalité qui est devenue claire, maintenant que son équipe de conseillers et hauts fonctionnaires se remplit, à savoir qu’il n’y a personne dans son cabinet ou dans son administration, qui puisse guider le président néophyte alors qu’il essaie de négocier un nouvel ordre mondial et de conclure un « grand accord » avec Vladimir Poutine, comme Trump aurait pu espérer le faire.
Jared Kushner, le beau-fils de Trump, n’a pas l’expérience et la profondeur nécessaires pour être un penseur stratégique de classe mondiale. Le secrétaire d’État de Trump, Rex Tillerson, possède des compétences d’entreprise grâce à ses années chez Exxon-Mobil, mais manque également d’une vision stratégique. Beaucoup d’autres postes essentiels sont allés à des généraux militaires qui peuvent être des administrateurs compétents, mais qui ont une expérience politique ou diplomatique limitée. Il a été question de conseils venant de Henry Kissinger, mais il n’a pas été vu ou entendu récemment, et il est douteux qu’à son âge avancé et avec sa fragilité, il puisse fournir des conseils cohérents.
Pendant que Trump lutte pour survivre aux attaques répétées contre sa nouvelle administration, il est également distrait de la réalité d’un monde en rapide évolution. Si et quand il se concentrera sur la situation géopolitique, il pourrait bien avoir à rattraper la Russie et la Chine, alors qu’elles sont en train de passer des accords avec d’autres acteurs régionaux et de combler le vide laissé par le désordre politique étatsunien en cours.
En supposant que Trump puisse attirer des conseillers talentueux doté d’une profondeur stratégique, il faudrait encore une vision énorme et des compétences diplomatiques équivalentes, pour conclure un « grand accord » qui pourrait marquer le début de la fin du chaos violent qui balaye une grande partie du monde depuis 2001. Si et quand cela deviendra possible, un tel accord pourrait ressembler à un « Yalta-2 », triangulaire, impliquant les États-Unis, la Russie et la Chine.
Gilbert Doctorow
– Le 22 mars 2017
Traduction le Saker Francophone
Source :
Consortium News
par Thierry Meyssan
La volonté du président Trump de combattre Daesh et d’en finir avec le terrorisme international est extrêmement difficile à mettre en œuvre. En effet, elle porte préjudice aux États qui l’ont organisé et implique une réorientation de la politique internationale. Le nouveau président états-unien ne semble pas en mesure de donner ordre à ses troupes de passer à l’attaque tant qu’il n’a pas trouvé et scellé de nouvelles alliances.
Réseau Voltaire | Damas (Syrie) | 21 mars 2017
L’opposition que rencontre le président Donald Trump est si forte que le plan de lutte contre Daesh, qui devait être présenté le 22 mars lors d’un sommet de la Coalition à Washington, n’est toujours pas prêt. Sa ligne politique est toujours aussi floue. Seul l’objectif d’éradication du jihadisme a été acté, mais aucune de ses implications n’a été résolue.
Le général Joseph Votel, le patron du CentCom, n’a toujours pas présenté les options sur le terrain. Il devrait le faire uniquement début avril.
Sur le terrain, on se contente donc d’échange d’information entre États-uniens d’un côté, Russes et Iraniens de l’autre. Pour maintenir les choses en l’état, les trois puissances sont convenues de prévenir un affrontement entre Turcs et kurdes. Et des bombardements intenses sont menés contre Al-Qaïda au Yémen et contre Daesh en Irak. Mais rien de décisif. L’attente est de rigueur.
Pour le compte de Londres et de Washington, l’arme du terrorisme international est gérée par la Ligue islamique mondiale depuis 1962. Elle comprend à la fois la Confrérie des Frères musulmans (composée d’arabes) et l’Ordre des Naqchbandis (surtout composé de turco-mongols et de caucasiens).
Jusqu’à la guerre du Yémen, le budget militaire de la Ligue était plus important que celui de l’armée saoudienne, de sorte que la Ligue est la première armée privée au monde, très loin devant Academi/Blackwater. Même s’il s’agit uniquement d’une armée de Terre, elle est d’autant plus efficace que sa logistique dépend directement du Pentagone et qu’elle dispose de nombreux combattants suicides.
C’est la Ligue —c’est-à-dire les Séoud— qui fournit à Londres et à Washington le personnel qui organisa la seconde « Grande Révolte arabe », en 2011, sur le modèle de celle de 1916, mais sous la dénomination de « Printemps arabe ». Dans les deux cas, il s’agissait de s’appuyer sur les wahhabites pour redéfinir les frontières régionales au profit des Anglo-Saxons.
Il ne s’agit donc pas simplement d’abandonner l’arme du terrorisme, mais aussi :
de rompre l’alliance entre Londres et Washington pour le contrôle du Moyen-Orient élargi ;
de priver l’Arabie saoudite et la Turquie de l’arme qu’ils développent pour le compte de Londres et de Washington depuis un demi-siècle ; de déterminer le futur du Soudan, de la Tunisie et de la Libye. En outre, il faut également trouver un accord avec l’Allemagne et la France qui ont abrité des dirigeants de la Confrérie depuis 1978 et ont financé le jihad.
D’ores et déjà, nous voyons que le Royaume-Uni ne l’entend pas de cette oreille. Il s’avère que c’est le GCHQ (service d’interception satellitaire britannique) qui a placé la Trump Tower sous écoutes durant la campagne électorale et la période de transition. Tandis que, selon l’Agence jordanienne Petra, l’Arabie saoudite a secrètement financé un tiers de la campagne électorale d’Hillary Clinton contre Donald Trump.
C’est pourquoi le président Trump semble chercher de nouveaux alliés pour lui permettre d’imposer ce changement.
Il organise actuellement une rencontre avec le président Xi Jinping au cours de laquelle il pourrait planifier l’adhésion de son pays à la Banque d’investissement chinoise. Il placerait alors ses alliés devant le fait accompli : si les États-Unis participent à la construction des routes de la soie, il deviendrait impossible au Royaume-Uni, à l’Arabie saoudite et à la Turquie, à l’Allemagne et à la France de poursuivre le jihad en Irak, en Syrie et en Ukraine.
Source Al-Watan (Syrie)
L’étude des relations bilatérales de ces trois pays, pris deux à deux, est très intéressante car ces relations conditionnent et expliquent bon nombre d’événements géopolitiques majeurs qui agitent la planète aujourd’hui.
On connaît les excellentes relations USA Israël sans en connaître tous les ressorts, les relations très froides teintées d’hostilité entre les USA et la Russie sans en connaître non plus toutes les raisons, mais ce dont on a moins conscience, c’est que ces relations USA Russie découlent pour une large part des relations Israël Russie dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles sont, malgré les apparences, tout sauf cordiales.
Examinons donc ces relations très particulières Israël Russie et voyons comment elles conditionnent largement les relations USA Russie, et pourquoi, malgré la volonté affichée de Trump, ces relations USA Russie auront beaucoup de difficultés à s’améliorer.
Derrière les poignées de main et les sourires de circonstance lors des rencontres bilatérales entre Poutine et Netanyahu, la relation entre la Russie et Israël, ne peut pas être bonne pour au moins dix raisons.
1 – La Russie a reconnu, dès novembre 1988, l’état de Palestine dans ses frontières de 1967 à l’ONU en entraînant derrière elle tous ses alliés des BRICS et de l’OCS (Organisation de coopération de Shanghai) et de très nombreux états indécis (137 pays au total à ce jour).*
2 – La Russie milite inlassablement, avec ses alliés BRICS et OCS, pour la reconnaissance par le reste de la communauté internationale (56 pays) du droit des Palestiniens à un État. Ce point est régulièrement évoqué dans les déclarations finales des congrès annuels des BRICS.
3 – La Russie a toujours voté à l’ONU pour les palestiniens, contre l’état hébreux sur tous les projets de résolutions opposant les deux parties, et notamment sur la résolution 2334 du 23 décembre 2016 dans le vote unanime du conseil de sécurité de l’ONU (14 à 0, abstention US) condamnant la poursuite des implantations israéliennes en Palestine occupée.
4 – La Russie est un allié fidèle et solide de la Syrie de Bachar el Assad, ennemi déclaré d’Israël. Son intervention militaire, en soutien des forces armées du seul gouvernement légal de Syrie, a entraîné l’échec d’un démembrement programmé de ce pays dont Israël espérait tirer profit (en annexant, entre autre, le Golan, château d’eau de la région).
5 – La Russie est un allié solide de l’Iran, principal ennemi déclaré d’Israël, auquel il livre de l’armement défensif (missiles S-300, commande iranienne de 9,3 milliards de $ d’armement en Novembre 2016 pour des chars T 90 et des avions).
Vladimir Poutine soutient aussi la candidature de Téhéran qui souhaite être membre à part entière de l’OCS (l’Iran en est « membre observateur » depuis plusieurs années). Une appartenance de l’Iran à l’OCS et les livraisons d’armes et de technologies russes pourraient rendre plus délicate, voire plus coûteuse, une intervention militaire préemptive du binôme israélo-arabe. Quant à la remise en place, contre l’Iran, de sanctions approuvées par l’ONU, elle est peu probable car la Russie, elle même objet de sanctions USA-UE, appliquerait son droit de veto et serait probablement suivie par la Chine).
6- La Russie entretient de bonnes, voire d’excellentes relations avec la Turquie et l’Irak, l’Égypte et la Libye, qui ne sont pas vraiment de grands amis d’Israël.
7 – La Russie a toujours condamné, avec ses alliés des BRICS et de l’OCS, la politique de colonisation, d’apartheid, de répression brutale et disproportionnée de l’état hébreu en Palestine, notamment à Gaza.
8 – La Russie a été, historiquement, terre de très forte présence juive et surtout terre de pogroms, notamment au XIXème et au début du XXème siècle. Une émigration récente et considérable des juifs de Russie (près d’un million depuis 1990) vers Israël ou vers les pays de la coalition occidentale a pu, à tort ou à raison, être perçue comme une forme de désertion par les autorités russes. Elle a considérablement réduit l’effectif et donc le poids politique de la communauté juive en Russie. En 1960 il y avait encore 2,3 millions de juifs en URSS (sur 212 millions d’habitants). Ils ne sont plus que 200 000 aujourd’hui dans la Russie de Poutine (sur 145 millions d’habitants).
9 – Pour assurer son pouvoir, Poutine a dû affronter une nomenklatura et une oligarchie ayant une très forte composante issue de la communauté juive (25% sur les 200 principaux oligarques, beaucoup plus sur la nomenklatura héritée de Eltsine). Pour éliminer ses principaux opposants membres de cette oligarchie, Poutine a dû frapper fort et faire des exemples (Berezovski, Goussinski, Mikhaïl Khodorkovski, Vladimir Yevtushenkov…..). S’agissant de la nomenklatura, il remplacé progressivement les proches de Eltsine par des hommes à lui à tous les postes clefs.
L’influence du Congrès juif de Russie s’en est trouvé, peu à peu, considérablement réduite.
10- Poutine sait depuis longtemps qui a monté, contre les intérêts russes, le coup d’État de Maidan en Ukraine alors qu’il préparait et tentait de réussir ses jeux olympiques de Sotchi. Il sait que Victoria Nulland, maître d’oeuvre US de ce coup d’état, est une néoconservatrice pure et dure d’ascendance ashkénaze. Il connaît les liens très étroits qui lient les néoconservateurs US à l’AIPAC (American Israeli Public Affairs Commitee) et l’AIPAC à Israël. Il connaît ceux qui, au Congrès US, s’opposent aujourd’hui à toute amélioration des relations USA Russie, pourtant souhaitée par . Il sait l’influence qu’exerce Benjamin Netanyahu sur ces « néocons » du Congrès US.
Au total, le simple examen des faits ci dessus évoqués montre que la Russie de Poutine et l’État Hébreu de Benjamin Netanyahu ne peuvent être que des adversaires irréductibles.
Ces deux hommes qui ne respectent que la force et les chefs d’état forts qui leur ressemblent, ne peuvent que se respecter, voire s’estimer, tout en s’opposant farouchement et froidement l’un à l’autre.
Tous les moyens vont être utilisés par les deux partis pour isoler, affaiblir, neutraliser l’adversaire. S’agissant d’Israël ces moyens utilisés vont inclure l’action conjointe de tous les lobbies qui le soutiennent dans de grands pays (USA, France, GB, Canada, Australie, mais aussi Russie, Brésil, Argentine). Ces lobbies qui lui sont attachés sont particulièrement actifs dans la politique, les médias, les affaires et chez les people.
Le russian bashing dans les médias occidentaux et l’attaque systématique dans ces mêmes médias de tous ceux qui, de près ou de loin, soutiennent la Russie ou veulent simplement dialoguer avec, ou avec tout autre adversaire d’Israël, peuvent facilement se comprendre ainsi.
La relation « fusionnelle » entre les États Unis et Israël est mieux connue, plus ouverte, mais rares sont ceux qui en identifient tous les ressorts et connaissent la véritable ampleur de l’influence de l’état hébreu sur la politique étrangère US.
Il faut se souvenir que le vote de la résolution 181 des Nations Unies sur le plan de partage de la Palestine et la reconnaissance d’un État juif n’a été obtenu le 29 novembre 1947 qu’après plusieurs tentatives infructueuses dont la première datait de septembre 1947. Les votes favorables n’étant pas suffisants en septembre et toujours pas le 25 novembre, le Yichouv représentant le mouvement sioniste en Palestine, a fait appel à la riche communauté juive américaine et en particulier à la « Zionist Organization of America (ZOA) » pour faire pression sur le gouvernement US afin qu’il incite certains états, en situation de dépendance, à changer leur vote.
Cet appel a porté ses fruits puisque 8 états (dont la France, fortement dépendante du plan Marshall) ont changé leur vote en 4 jours, entre le 25 et le 29 novembre 1947 permettant enfin la reconnaissance de l’état d’Israël. Notons, pour l’anecdote, que Staline, croyant que Ben Gourion allait faire du nouvel état un état communiste, a fait voter en faveur du plan de partage.
A la suite de cette première réussite dans l’instrumentalisation de la communauté juive américaine, l’état hébreu a compris tout l’intérêt d’organiser et de cultiver sa relation avec les États Unis, pays surpuissant, membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU avec droit de veto.
Dès 1951, l’AIPAC (American Israeli Public Affairs Comittee), principal outil d’influence d’Israël sur le gouvernement des États-Unis, est créé. Il se donne six objectifs principaux :
• Faire du lobbying auprès du Congrès américain et de la Maison Blanche pour préserver les intérêts israéliens,
• S’assurer du veto des États-Unis contre toute résolution de l’ONU condamnant les actions israéliennes,
• Assurer une aide financière et militaire généreuse envers Israël,
• Préparer la future génération de leaders US pro Israéliens,
• Surveiller les votes et les propos des élus américains concernant les affaires liées de près ou de loin à Israël,
• Coordonner et orienter les donations des juifs américains pour les candidats aux élections, notamment présidentielles.
Il est important de noter que ce puissant lobby est riche, bipartisan et plutôt transparent.
Après plus de 65 ans d’existence, il est particulièrement efficace tant chez les Démocrates que chez les Républicains. Il ne cache pas grand-chose de ses objectifs et de ses méthodes.
C’est peut être, en partie, ce qui fait sa force.
Il est également important de noter qu’au travers des donations aux candidats aux élections, l’AIPAC « achète » évidemment le vote du parlementaire élu grâce à son aide, ou la position de politique étrangère du Président des États-Unis élu grâce aux donations de ses membres, ou des postes clefs de conseillers dans la haute administration US, notamment dans la politique étrangère, dans le secteur de la défense et dans le renseignement.
L’AIPAC peut évidemment compter sur une très forte majorité des médias qu’il contrôle et qui lui est dévouée et sur de nombreux « people » qu’il a contribué à promouvoir.
A noter que ce système qui fonctionne de manière ouverte aux USA, existe aussi, mais de manière plus occulte, dans certains autres pays de la « coalition occidentale ».
Pour compléter ce dispositif, le Mossad a mis en place, principalement aux USA mais aussi ailleurs, un dispositif très efficace facilitant le renseignement et l’action directe. Il s’agit du système unique des sayanims, individus de bon niveau et bien placés dans la société, membres de la diaspora et acceptant d’aider Israël. . Ce système est parfaitement décrit par Jacob Cohen dans sa courte conférence consultable sur You Tube : https://www.youtube.com/watch ?v=2FYAHjkTyKU Selon lui, ils seraient environ 15 000 aux USA.
Ce dispositif est également évoqué par Victor Ostrovsky, ancien agent du Mossad ayant fait défection, ou par Gordon Thomas, dans son livre : « l’histoire secrète du Mossad ».
Enfin l’AIPAC, outil d’influence d’Israël au coeur de la gouvernance US, est très lié à l’idéologie néoconservatrice. Ce lien apparaît clairement dans l’article de Laurent Guyenot de mars 2013.
Extrait : « Le néoconservatisme, qui est généralement perçu comme une droite républicaine extrême, est en réalité un mouvement intellectuel né à la fin des années 1960 au sein de la rédaction de la revue mensuelle Commentary, l’organe de presse de l’American Jewish Committee qui a remplacé le Contemporary Jewish Record en 1945.
The Forward, le plus ancien quotidien juif américain, écrit dans un article de 2006 : « S’il y a un mouvement intellectuel en Amérique dont les juifs peuvent revendiquer l’invention, c’est bien le néoconservatisme. Cette pensée horrifiera sans doute la plupart des juifs américains, majoritairement libéraux.
Et pourtant c’est un fait qu’en tant que philosophie politique, le néoconservatisme est né parmi les enfants des immigrants juifs et qu’il est actuellement le domaine particulier des petits-enfants de ces immigrants ». L’apologiste du néoconservatisme Murray Friedman explique cela par la bénéficience inhérente au judaïsme, « l’idée que les juifs ont été placés sur terre pour en faire un monde meilleur, peut-être même plus sacré. »
On peut effectivement constater que les principaux néoconservateurs américains qui ont fondé le PNAC ( Project for a New American Century ) en 1997, et rédigé son texte de référence « Rebuilding America’s Defenses » en 2000, sont d’ascendance juive Krauthammer, Kristol, Podhoretz, Perle, Kagan, Horowitz, Wolfowitz, etc.)
Depuis septembre 2001, ce sont bien les néoconservateurs qui ont initié la politique d’ingérence US tous azimuts et tous prétextes de Bush (Irak, Afghanistan), et qui ont continué, à un moindre degré sous Obama, à influencer la politique étrangère (printemps arabes, Libye, Syrie, Yémen, Ukraine). Si le PNAC est bien mort en 2006 suite au conflit irakien, l’idéologie néoconservatrice, elle, imprègne encore les esprits dans la politique et la haute administration US.
Obama n’a réussi à échapper à cette influence « néoconservatrice-AIPAC » qu’à troisoccasions, lors de son second mandat, alors qu’il ne cherchait plus la réélection :
le refus d’appliquer des frappes sur les forces du régime syrien du 30 août 2013,
l’accord sur le nucléaire iranien du 14 juillet 2015,
l’abstention US lors du vote du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant la poursuite des implantations israéliennes en Palestine occupée du 23 décembre 2016.
L’influence incontournable et la puissance de l’AIPAC se sont clairement exprimées lorsque Benjamin Netanyahu a pu se faire inviter par le président du Congrès US à prononcer un discours, devant les parlementaires, le 3 mars 2015, contre la volonté du Président Obama, ce qu’aucun autre chef d’état au monde n’est capable de faire, et ce qu’il a probablement payé le 23décembre 2016.
Quid de la relation entre l’AIPAC et Trump aujourd’hui ?
Le 21 Mars 2016, Hillary Clinton et Trump ont effectué leur « grand oral » à la conférence annuelle de l’AIPAC. Le flamboyant Trump a fait un tabac auprès des congressistes mais pourtant, c’est la prévisible et plus « docile » Hillary qui a été adoubée par la direction de l’AIPAC au grand dam de ses militants.
Notons au passage un élément important de ce choix : H. Clinton affichait son hostilité, voire une véritable agressivité à l’égard de la Russie tandis que Trump proclamait qu’il fallait s’entendre avec les russes et coopérer avec eux dans la lutte contre le terrorisme.
La position de Trump sur la Russie ne pouvait qu’indisposer l’AIPAC, représentant les intérêts d’Israël, adversaire de la Russie, et les néoconservateurs (liés à l’AIPAC), partisan d’une suprématie sans partage des USA et donc d’une lutte sans merci contre tout « challenger » pouvant contester leur monopole de superpuissance.
Conformément aux objectifs qu’il s’est fixé, l’AIPAC a orienté les donateurs vers les deux candidats, en privilégiant très fortement H. Clinton. Dans les dix derniers jours de campagne, anticipant une possible victoire de Trump, l’AIPAC a fait un petit effort en sa faveur pour faire valoir son image bipartisane et surtout pour ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier. Bien lui en a pris.
Plusieurs journaux de l’état hébreu tel Haaretz, le Jerusalem Post, JSS News, se sont réjouis du niveau des donations de la communauté juive américaine aux deux candidats : Selon JSS News et le Jérusalem Post, 50% des donateurs de Clinton et 25% des donateurs de Trump étaient juifs.
Selon Haaretz qui nous a livré leurs noms, les 5 plus gros donateurs de Clinton étaient également juifs. Cela donne une idée du niveau de l’investissement de l’AIPAC, représentant les intérêts d’Israël, dans la campagne présidentielle US. Cela donne aussi une idée du niveau des retours sur investissement attendus par l’AIPAC.
Quels ont été ces retours jusqu’à présent ? Ils semblent à la hauteur de l’investissement mais sans plus. Il y a :
La promesse de campagne de transférer l’ambassade US de Tel Aviv à Jérusalem, dont nul ne sait si Trump la tiendra,
Le projet de décret présidentiel contre l’ONU qui a osé défier Israël par une condamnation de la politique d’implantation en Palestine occupée, à l’unanimité du conseil de sécurité (14 à 0, abstention US). Nul ne sait encore si Trump va signer ce décret.,
La nomination comme ambassadeur en Israël de David Friedman, soutien de la colonisation israélienne en Cisjordanie et adversaire déclaré d’une solution à deux Etats,
La nomination comme conseiller spécial sur les affaires du Proche et Moyen orient de Jared Kushner, 36 ans, gendre de Trump et mari d’Ivanka, juif orthodoxe, soutien assumé d’IDF (Israeli Defense Forces), sayan dont l’impartialité sur le problème israélo-palestinien est loin d’être évidente.
La nomination de quelques membres du cabinet : Steven Mnuchin, secrétaire au Trésor, Gary Cohn, directeur au budget entre autres.
Mais Trump a également mis en place de puissants contre-pouvoirs en nommant Steve Bannon, haut conseiller à la stratégie. Directeur de campagne de Trump mais trop indépendant de l’AIPAC, Bannon dérange au point qu’une campagne est organisée contre lui pour obtenir son départ. Il est qualifié de raciste, de suppôt de l’extrême droite et d’antisémite par ses opposants dont il n’est pas très compliqué de savoir qui les instrumentalise en sous-main.
Trump a également nommé au département d’État (ministère des affaires étrangères) Rex W Tillerson, un proche de Vladimir Poutine, décoré par lui de l’ordre russe de l’amitié en 2013. Ceci ne fait les affaires ni de l’AIPAC, ni d’Israël. Lors de son audition par la commission des affaires étrangères, Tillerson a dû simuler une prise de distance suffisante avec la Russie pour pouvoir obtenir sa confirmation mais il a du aussi promettre de prendre Elliot Abrams, candidat de l’AIPAC, comme adjoint.
Sur le conseil de Steve Bannon, Trump a refusé d’attribuer le poste d’adjoint de Tillerson à Elliot Abrams, néoconservateur pur et dur, gendre de Norman Podhoretz, gourou de l’idéologie néoconservatrice et membre éminent du lobby pro-israélien. C’est un échec de l’AIPAC qui tentait d’infiltrer l’un des siens au plus haut niveau de la politique étrangère US. Les choses sont parfaitement claires : Trump et Bannon ne veulent pas d’une politique étrangère inspirée par les néocons et par l’AIPAC.
Enfin Trump a nommé à des poste clefs 4 généraux (un record) qui ne semblent pas avoir de liens avec l’AIPAC. Flynn, conseiller à la Sécurité Nationale ; Mattis, secrétaire à la Défense ; Kelly, secrétaire à la sécurité du territoire ; Zinke, secrétaire à l’intérieur.
Lors de la période de transition et alors que Trump était en conflit avec la CIA sur l’ingérence présumée des russes dans la campagne électorale US, c’est le directeur du MOSSAD Yossi Cohen qui est venu, le 17 décembre 2016, exposer à l’équipe de Trump sa vision de la situation internationale, notamment au Proche et Moyen Orient et sur le conflit israélo-palestinien, en présence de Yaakov Nagel, chef du conseil de sécurité national israélien et de Ron Dermer, ambassadeur israélien aux États Unis. C’est encore Israël qui a lancé la première invitation pour une visite d’État au nouveau président US.
Ceux qui souhaitent creuser le sujet des relations USA-Israël peuvent se référer à l’excellent ouvrage de John Mearsheimer et Stephen Walt, deux universitaires de très haut niveau en science politique des l’universités de Chicago et d’Harvard : The Israel Lobby and U.S. Foreign Policy « Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine ». (Résumé en français sur :
http://republique-des-lettres.fr/10050-mearsheimer-walt.php
Les deux universitaires ont évidemment perdu leur poste et leur carrière (la liberté d’expression a des limites aux USA et les vérités ne sont pas toutes bonnes à dire), mais cela donne de la crédibilité à l’ouvrage qui est intéressant et très argumenté.
Compte tenu de ce qui vient d’être dit, examinons maintenant où en sont les relations USA Russie et leur possible évolution.
Sous l’influence des néoconservateurs US, démocrates et républicains, liés à l’AIPAC, et avec l’appui quasi unanime des médias états-uniens dont on sait qui les contrôle, le Russian Bashing (dénigrement systématique de la Russie), est devenu très à la mode Outre-Atlantique. Dans ces conditions, les relations USA-Russie ne peuvent être bonnes et auront bien du mal à s’améliorer.
Il y a, bien sûr, l’héritage lointain de la guerre froide dont on laisse entendre aux populationsoccidentale qu’elle est de retour en raison de la volonté et des actions du « dictateur ( ?) » Poutine ;
Il y a « ce méchant Poutine, allié de Bachar, qui ne combat pas DAESH ???, mais qui massacre les pauvres « terroristes modérés » qui veulent promouvoir la démocratie et les droits de l’homme en Syrie » ; « Ce méchant Poutine qui écrase ALEP sous les bombes, et qu’il faudrait juger au TPO (Tribunal Pénal Occidental) pour crime de guerre et crime contre l’humanité ; »
Il y a « ce méchant Poutine qui agresse la pauvre Ukraine et annexe la Crimée (on n’ose pas ajouter contre la volonté de sa population) » ; et qui soutient les deux républiques autoproclamées de Donetsk et de Lougansk contre le gouvernement légitime ( ?), issu du coup d’état de Maidan ; »
Il y a « ce méchant Poutine qui provoque l’OTAN et menace l’occident tout entier par ses actions en Ukraine et au Proche orient ; » et qui ose faire transiter sa flotte par la Manche.
Il y a aussi« ce méchant Poutine qui vient perturber les élections US en favorisant l’élection de Trump » et qui, avec Wikileaks et Julien Assange complote contre les États-Unis ; »
Il y a, encore et toujours, « ce méchant Poutine, qui envoie 100 hooligans, super entraînés au combat, rosser 2 000 supporters (et hooligans) anglais lors de la coupe du monde de football ; »
Il y a ce méchant Poutine qui dope ses athlètes et dont le pays doit être interdit de JO, alors que nous, gentils occidentaux, ne dopons jamais nos sportifs (sauf exceptionnellement tout de même : Lance Armstrong et beaucoup d’autres).
Il y a enfin « ce méchant Poutine qui, à l’ONU, met son veto, avec la Chine, à toutes les excellentes résolutions que nous proposons pour favoriser la paix dans le monde et l’instauration de la démocratie ; »
Il y a même, pour les météorologues, ces vagues de froid désagréables qui nous viennent de Sibérie, pays du méchant Poutine.
Depuis que Trump a exprimé sa volonté d’améliorer la relation USA-Russie ..., l’hystérie russophobe a véritablement explosé dans tous les milieux sous forte influence AIPAC (camp démocrate, néocons, médias, sayanims, people).
Qu’on en ait eu conscience ou non, Israël a certainement indiqué sa préférence à la direction de l’AIPAC, son relais aux États-Unis, pour qu’il soutienne prioritairement la russophobe Clinton dans l’élection présidentielle. L’AIPAC l’a fait de manière très officielle en mars 2016. Si Tel Aviv ne l’avait pas voulu, il ne l’aurait pas fait.
Aujourd’hui, Israël n’a pas changé d’avis. Trump, le russophile, élu malgré tous les efforts consentis pour le faire battre, avec 95% des médias contre lui, un budget de campagne de 800millions de $, très inférieur à celui de Clinton (1,3 milliard de $) n’est pas le Président espéré parTel Aviv et il faut donc le mettre dans une situation telle qu’il ne puisse pas réaliser un rapprochement avec la Russie, préjudiciable aux intérêts israéliens.
Soutenus par l’AIPAC, les néoconservateurs et les sayanims de tous les secteurs, les médias et les people sont à la manoeuvre. Le milliardaire SOROS, 87 ans, d’ascendance ashkénaze, bien connu pour avoir financé toutes les « révolutions colorées » dans le monde, expert de classe mondiale dans la création du chaos, fervent soutien et second principal donateur de la campagned’Hillary, dirige la dissidence en finançant très ouvertement les manifestations anti-Trump dans quelques grandes villes à forte majorité démocrate. Ces manifestations sont évidemment relayées et leur ampleur fortement exagérée par des médias complices, y compris en Europe.
Du côté du Congrès, Netanyahu et l’AIPAC comptent aussi sur l’appui de leurs nombreux soutiens néocons démocrates mais aussi républicains.
Dans le propre camp du Président élu, le sénateur Mc Cain, président de la commission de la défense, et le sénateur Lindsay Graham, président de la commission des affaires étrangères, ont déjà déclaré leur opposition déterminée à toute levée par Trump des sanctions contre la Russie.
Ils ont même menacé Trump de passer par la voie législative pour interdire tout rapprochement jugé contraire aux intérêts des États Unis et à la sécurité nationale.
Les jeunes sénateurs Rubio et Cruz, anciens concurrents de Trump à la primaire républicaine, qui souhaitent évidemment poursuivre une brillante carrière politique, se sont prononcés, eux aussi, contre tout rapprochement avec « l’ennemi » Russe.
Dans de telles conditions, Trump aura du mal à faire valoir son point de vue et à tenir ses promesses de campagne. Il rencontrera beaucoup d’obstacles sur le chemin de la normalisation des relations avec la Russie. Il n’a pas la majorité au Congrès sur tous les sujets si l’on tient compte des parlementaires néocons de son propre camp qui travaillent directement pour l’état hébreu.
Pour conclure, sur les relations USA-Israël, le seul homme qui dispose vraiment de la majorité absolue au Congrès US aujourd’hui est bien Benjamin Netanyahu.
Mais Trump est un homme fort, déterminé et malin qui sait parler au peuple américain.
Contre toute attente, il a gagné les primaires républicaine. Contre toute attente, contre 95% des médias et des instituts de sondage, et avec moitié moins de dépenses que son adversaire, il a gagné la présidentielle. Il ne renoncera peut être pas à la normalisation des relations avec la Russie. Son Secrétaire d’État Tillerson est populaire. Il peut, à petit pas, y parvenir en obtenant, par exemple, un nouvel accord sur le désarmement.
En conclusion, on peut vraiment se demander si l’action bipartisane et combinée de l’AIPAC,des néoconservateurs et des sayanims US, tous étroitement unis dans la défense des intérêts de l’état hébreu, ne décide pas souvent de la politique étrangère des États Unis et donc de la paix ou de la guerre dans telle ou telle partie du monde.
Il est aussi fascinant de constater qu’Israël, petit État de 22 000 km² (2 fois le département de la Gironde), peuplé de 8,6 millions d’habitants (30% de moins que l’Île De France) puisse exercer une telle influence au niveau planétaire.
Ce système « pro-Israël » qui fonctionne parfaitement aux États Unis existe-t-il à l’identique dans d’autres pays ? La réponse est oui.
Un tel système existe, mais plus opaque, dans une bonne dizaine de pays au moins, parmi lesquels la France, la Grande Bretagne, le Canada, l’Australie mais aussi le Brésil, l’Argentine et même la Russie où il est, aujourd’hui, maîtrisé par Poutine.
En France, il existe bien un lobby dont l’influence a été évoquée par François Mitterand. Il existe bien des néocons qui influencent les décisions de politique étrangère et de défense. Le journaliste d’investigation Vincent Jauvert en a débusqué tout un groupe qui contrôlerait le Quai d’Orsay et serait gentiment surnommé par leurs collègues : « la secte ».
Quant aux sayanims, ils seraient environ 2000 en France selon Jacob Cohen. On les trouve évidemment dans le gouvernement et la haute administration, au parlement (60 députés francoisraéliens), aux Affaires Étrangères, à la Défense, dans le renseignement, dans la presse, dans l’audiovisuel, à la culture, dans les affaires et chez les people.
Ceci explique que notre politique étrangère soit strictement alignée sur celle des USA depuis 2007. Ceci explique aussi que notre presse se soit strictement alignée sur la presse US pour porter la candidature d’Hillary, la russophobe, contre Trump le russophile. Ceci explique enfin pourquoi nos médias poursuivent le dénigrement systématique de Trump avec leurs partenaires US.
On peut aussi se demander si le « système » décrit ci dessus, en essayant de promouvoir, pour les prochaines présidentielles française, un candidat à sa botte, ne fait pas payer à Mr François Fillon sa volonté affichée de dialogue avec Poutine et Bachar el Assad, deux adversaires d’Israël.
Le simple examen des noms, des CV et des entreprises des patrons des médias les plus agressifs envers Mr Fillon est, en effet, assez révélateur.
Il y a le groupe Le Monde avec Louis Dreyfus, Pierre Berge, et Niel (Le Monde, La Vie, Le Huffington Post, Le courrier international, le Nouvel observateur, rue 89, …etc….)
Mais il y a surtout les médias du franco-israélien DRAHI, sayan émérite, qui a reçu le prix Scopus de l’université hébraïque de Jérusalem le 18 mars 2015 : (L’Express, L’Expansion, L’Étudiant, Libération, BFMTV, RMC, I24 …etc... ),
Le nombre et la notoriété des titres coalisés autour de la candidature de Mr Macron, donc contre celle de François Fillon, sont impressionnants. Le bon peuple sera-t-il dupe ? Rien n’est moins sûr.
A noter, pour l’anecdote, quatre faits incontestables :
1 - Mr Macron, ministre des finances, a aidé Mr Drahi, en lui accordant un feu vert de Bercy le 28 octobre 2014 pour racheter SFR. Ce feu vert avait été refusé par son prédécesseur parce qu’il posait des problèmes importants de surendettement, de fiscalité, et de concurrence. Mr Montebourg, ministre précédant Mr Macron, disait de Mr Drahi : « Il a une holding au Luxembourg, son entreprise est cotée à la bourse d’Amsterdam, sa participation personnelle est à Guernesey, dans un paradis fiscal, et lui-même est résident suisse ».
2 – L’empire Drahi a aujourd’hui une dette colossale de 50 milliards d’euros, plus élevée que celle de Madoff au moment de sa faillite. Il va avoir besoin de soutien dans les années à venir , pour sortir du surendettement dans lequel il se trouve, d’autant que la valeur de ses actifs ne cessent de chuter en bourse. A moins que l’épilogue de cette aventure Drahi ne ressemble à celle des affaires Stavisky ou Madoff.
3 – Le banquier de Mr Drahi, Bernard Mourad, ancien de la banque Morgan Stanley, devenu patron de Altice média (du Groupe Drahi), a démissionné de ses fonction en Octobre 2016 pour devenir conseiller spécial d’Emmanuel Macron.
4 – L’empire médiatique de Drahi soutient aujourd’hui avec une énergie farouche la candidature de Mr Macron en tentant d’écraser Mr Fillon. Il ne s’agit peut être que de coïncidence, mais cela ressemble furieusement à un renvoi d’ascenseur pour le feu vert d’octobre 2014 et à nouvel investissement de l’empire Drahi pour les années à venir. Une campagne électorale coûte cher. Qui donc finance celle de Mr Macron ?
Les médias de Drahi et de Bergé décideront-ils, à eux seuls, de l’issue du scrutin d’avril prochain , en « travaillant » quotidiennement au corps les électeurs français ?
Les français auront-ils un sursaut de lucidité en rejetant cette forte incitation médiatique à voter selon le plan des Drahi, Bergé et consorts, et en faisant mentir les sondages comme ils l’ont fait en novembre et janvier dernier ?
L’avenir nous le dira.
Fait marquant du sommet de l'Union Africaine: le retrait de la plupart de ses membres de la cour pénale international. Un geste qui marque la volonté d'indépendance de ces pays vis à vis de l'occident et celle de peser dans les affaires du monde.
Le récent sommet de l'Union africaine qui s'est déroulé dans la capitale éthiopienne Addis-Abeba a confirmé une fois de plus les clivages qui existent au sein du continent africain, mais aussi que l'Afrique ne sera pas absente des processus du monde multipolaire.
En effet, l'organisation panafricaine a adopté une stratégie de retrait collectif de la Cour pénale internationale (CPI). Pourtant et sans surprise, certains pays n'ont pas manqué de se faire les « avocats » de ladite structure, notamment le Sénégal, la Côte d'Ivoire ou encore le Nigeria. Des pays dont les leaders actuels sont connus pour avoir des liens très proches avec les élites occidentales. Néanmoins, et malgré leur opposition au processus engagé, l'Afrique semble effectivement décidée à quitter massivement la CPI.
Pour rappel, le Burundi avait montré l'exemple en lançant le processus, pour être presque immédiatement suivi par l'Afrique du Sud, puis par la Gambie. Plus que cela, la République sud-africaine semble avoir pris le leadership au niveau continental dans ce mouvement d'opposition face à une structure dite de justice internationale n'ayant pas remplie le rôle qui lui avait été confié. Et vu au regard du le processus désormais engagé au niveau désormais de l'UA, les pressions occidentales n'y feront rien, mis à part les quelques exceptions citées.
Pourquoi ce retrait massif africain de la CPI est-il si important?
Tout d'abord, car pour beaucoup de nations africaines, la cour est une structure défendant des intérêts néocolonialistes et mêmes racistes. Sa caractéristique est de s'attaquer aux leaders africains qui s’opposent aux manœuvres occidentales dans leurs pays et régions, tout en épargnant gracieusement ceux travaillant en étroite « collaboration » avec les élites de l'Occident. Cette hypocrisie est devenue aujourd'hui presque impossible à cacher, d'où la « révolte » africaine. L'autre raison avancée par le leadership des dirigeants de plusieurs pays africains est que plusieurs grandes puissances mondiales ne reconnaissent pas la compétence de la CPI : États-Unis, Chine, Inde, et plus récemment la Russie, qui s'est aussi retirée en intégralité de cette structure.
Un autre argument en faveur des partisans de la sortie, c'est effectivement le fait qu'aucun leader de pays occidental ou satellitaire affilié à ceux-ci, n'ait jamais été visé par une quelconque poursuite à son encontre, même en étant responsable de crimes indéniables, en différents endroits du monde. Plusieurs experts et observateurs reconnaissent aussi l'accusation qui est portée en direction de la Cour pénale internationale est d'être un instrument de punition et de pression politique de l'Occident.
Par ailleurs, de plus en plus de voix s'élèvent actuellement en Afrique pour mettre en place une Cour pénale panafricaine. Un défi de taille, mais qui pourrait effectivement être la solution à terme pour résoudre les problèmes existants au niveau continental. Enfin, il y a aussi les partisans du renforcement des justices nationales, parmi eux beaucoup d'experts africains comme étrangers, notamment Alexandre Mezyaev, un l'expert russe du droit international qui connaît bien l'Afrique. Leur argument: renforcer l'état du droit des juridictions concernées tout en privilégiant la souveraineté nationale.
Quoi qu'il en soit et à travers cette initiative panafricaine au niveau de l'UA, l'Afrique confirme qu'elle compte faire partie intégrante du monde multipolaire et des processus qui en découlent. Les pressions extérieures vont certainement se poursuivre, peut-être même s'accentuer, mais c'est effectivement aux États africains de décider de leur avenir, dans un cadre souverain. Si certains pays préfèrent rester dans le giron occidental, il faut leur reconnaître ce droit.
Mais ceux ayant qui ont décidé de s'en 'affranchir et de former les alliances qu'ils jugeront eux-mêmes nécessaires, ont eux aussi ce droit que personne ne peut leur dénier. Et c'est dans ce cadre-là qu'il faut voir la suite des événements. Une suite logique: beaucoup d'autres pays africains vont vraisemblablement quitter la CPI, d'autres vont y rester pour encore quelques temps. Le futur montrera qui avait raison.
Les destructions dans les vieux quartiers d’Alep
Les choses sont allées très vite à Alep. Et il se peut très bien que la bataille d’Alep s’achève avant la fin de l’an, date limite fixée par le gouvernement syrien.
A l’heure actuelle ce sont près de 80% des quartiers est qui ont été repris depuis le lancement de la bataille d’Alep il y a trois semaines.
« Pour le moment, 47 quartiers d’Alep-Est, assiégés auparavant par les terroristes, sont passés sous le contrôle absolu des forces syriennes. Le 7 décembre, les troupes syriennes ont libéré des djihadistes encore deux quartiers dans la partie est d’Alep et ont également pris une grande hauteur dans le village de Sheikh Lutfi », a annoncé pour sa part le Centre russe pour la réconciliation des parties en conflit en Syrie.
Ces dernières heures, ce sont les quartiers Bab al-Nayrab, al-Safsafah, Bab al-Hadid, Agyour, Karam al-Jabal et al-Farafirat qui ont été repris , mais les militaires ne les ont pas encore investis, en attendant l’arrivée des équipes de génie civile chargées de détecter les zones minées et piégées et de les nettoyer.
Dans l’après-midi, l’armée arabe syrienne a arboré de nouveau le drapeau syrien sur le bâtiment du Palais de justice situé au sud de la citadelle, a indiqué Média de guerre.
Mardi, l’armée arabe syrienne et ses alliés se trouvaient à 800 mètres de la citadelle historique d’Alep.
Ce mercredi ils sont arrivés au nord-ouest de ce fort, bâti depuis l’époque romaine et qui est resté entre les mains des militaires réguliers, malgré les centaines d’attaques des rebelles qu’ils ont encaissées durant ces 5 dernières années.
Grande débandade des miliciens
Entre temps ce fut la grande débandade des rebelles : des centaines ont d’ores et déjà déposé les armes et se sont rendus.
D’autres ont pris la fuite durant la nuit, désertant entre autre les quartiers de la vielle ville d’Alep, et se retranchant davantage vers les quartiers qui leur restent au sud.
Selon l’OSDH, les miliciens rebelles se sont retirés des parties de la Vieille ville qu’ils contrôlaient encore après la reconquête de l’armée des quartiers voisins de Bab al-Hadid and Aqyul, de « peur d’être assiégés ». Mais ils ne devraient pas rester longtemps dans cette partie. Selon les coordinations des rebelles, ces derniers ont finalement pris la décision de se retirer définitivement, notamment vers Idleb. Ils ont dit avoir mandaté des représentants en Turquie pour négocier avec leur sortie l’armée arabe syrienne.
Selon Média de guerre, il est également question d’une demande de trêve de 5 jours faite par les rebelles pour évacuer les blessés et permettre aux civils qui le désirent de sortir.
Les quartiers qui leur restent étant Kallaseh, Boustane al-Kaser, al-Ansari, al-Machhad, al-Soukkkari, al-Salihine, et Karam al-Daadaa, en allant vers cheikh Said.
C’est-à-dire en tout et pour tout 11 km2, sur les 45 km2 initiaux. L’offensive contre ces quartiers se fait à l’heure actuelle à partir de 4 axes.
Ce mercredi soir, la nouvelle carte des quartiers est d’Alep encore sous le contrôle des rebelles, en bleu, se présente comme ci-dessous.
Selon les dernières informations de Média de guerre, les forces gouvernementales et leurs alliés ont conquis le quartier al-Salihine.
Entretemps, les bombardements des quartiers ouest (par les rebelles ndjf) ne connaissent pas de répit.
Selon l’agence syrienne Sana, 12 personnes, dont des enfants, ont été tuées et au moins 64 autres blessées dans un pilonnage mené ce mercredi contre cinq quartiers différents.
Mardi, 11 personnes avaient été tués par des tirs rebelles à l’ouest d’Alep, dont trois enfants.
Les retrouvailles
Se trouvant à Alep , la correspondante de la télévision russe RT a été témoin des retrouvailles des proches aleppins ayant vécu dans les deux parties de la ville.
Ce fut selon elle un moment empli d’émotions pour des gens qui ne s’étaient vus depuis 2012.
Sources: Média de guerre, AFP, RT,
Ironie du sort, c’est maintenant au tour du président russe Vladimir Poutine de reprendre ce que feu Ronald Reagan avait un jour conseillé à propos des relations soviéto-américaines : « Faire confiance, mais vérifier ». Poutine pourrait cependant introduire une légère modification : « Faire confiance, mais prudemment ». Reagan a prononcé ces mots célèbres après avoir décidé qu’il pouvait faire des affaires avec Mikhaïl Gorbatchev – en fait pour insister spécifiquement auprès de ce dernier sur les procédures étendues de vérification qui permettraient aux deux parties de surveiller la conformité du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire signé le 8 décembre 1987.
Gorbatchev aurait répondu : « Vous répétez cela à chaque rencontre », à quoi Reagan a répliqué : « J’aime ça. » Poutine doit avoir un échange jovial de ce genre avec le président élu américain Donald Trump, mais l’ambiance est frappante.
Poutine doit jauger que Trump fait juste des déclarations correctes à propos des liens avec la Russie, la dernière étant son interview avec le New York Times jeudi, où il a dit :
« J’aimerais pouvoir bien m’entendre avec la Russie et je pense qu’ils aimeraient bien s’entendre avec nous. C’est dans notre intérêt mutuel. Et je n’y vais pas avec une idée préconçue, mais je vous dirai, je dirais – quand on disait pendant la campagne que Donald Trump aime Poutine, et Poutine aime Donald Trump, j’ai dit, ouais, ce serait bien, je l’ai dit face à des milliers de gens, ne serait-ce pas bien que cela se passe vraiment comme on l’a dit, ne serait-ce pas bien si nous nous entendions effectivement avec la Russie, ne serait-ce pas bien si nous nous attaquions ensemble à ISIS, qui en plus d’être dangereux, coûte très cher, et d’ailleurs, ISIS n’aurait jamais dû être autorisé à exister, et que les gens se lèvent et me donnent un coup de main massif. Vous savez qu’on pensait que c’était mal que je m’entende avec Poutine ou que je croie fermement ce serait positif si nous pouvions nous entendre avec la Russie. C’est une grande chose que nous puissions nous entendre non seulement avec la Russie mais avec d’autres pays. »
Mais ensuite, Trump n’a pas osé appeler cela une saine remise à zéro, plaidant que la réticence est admise « après ce qui s’est passé auparavant » (sous l’administration Obama). Trump a réussi à donner une impression de bonhomie, d’alchimie personnelle et de lutte contre ISIS – rien de plus, rien de moins.
En tout cas, Moscou vient de faire deux annonces importantes, qui vont dans le sens de renforcer la dissuasion stratégique de la Russie contre tout mouvement militaire belliciste des États-Unis. Premièrement, Moscou a annoncé mardi dernier le déploiement de missiles sol-air de pointe S-400 et de missiles nucléaires Iskander à Kaliningrad en réponse au renforcement des capacités militaires de l’OTAN aux frontières occidentales de la Russie.
Les analystes militaires considèrent le système Iskander comme supérieur à tous ses analogues américains ou étrangers en termes de mobilité stratégique, de furtivité, de mission de vol et de capacité à remplir des missions de combat sous le feu et les contre-mesures électroniques. Effectivement, toute l’Europe devient maintenant une cible facile. La durée de vol d’un Iskander de Kaliningrad à Berlin sera à peu près de trois minutes.
Sur le plan politique, la Russie surveille l’OTAN, ce qui signifie surveiller l’administration étasunienne. Poutine a laissé entendre récemment dans une interview avec Oliver Stone que les décisions de l’OTAN sont prises à Washington.
Deuxièmement, mardi, les médias russes ont révélé le déploiement de systèmes de missiles côtiers sol-mer dernier modèle, dénommés Bal et Bastion dans les îles Kouriles contestées de l’Extrême-Orient. Le Bal a une portée de 130 kilomètres et le Bastion de 300 kilomètres.
Moscou maintient que le déploiement ne devrait pas nuire aux pourparlers avec Tokyo pour la signature d’un traité de paix. En effet, le déploiement aux Kouriles doit être vu dans le contexte de l’essai par les États-Unis d’un missile intercepteur conçu avec l’aide de la technologie japonaise, ainsi que de l’essai du missile standard SM-3 américain et du système de défense antimissile AEGIS.
La coopération américano-japonaise dans la défense antimissile est censée être uniquement dirigée contre Pyongyang, mais Moscou rejette cet argument comme spécieux. Bien sûr, le déploiement dans les Kouriles est une rebuffade pour le Japon et un signal à Tokyo que Moscou ne fera aucune concession territoriale, mais sur le plan stratégique, c’est le positionnement américain dans l’Extrême-Orient russe – sous le prétexte de la menace nord-coréenne – et l’alliance du Japon et des États-Unis qui préoccupe la Russie. (Lire un commentaire russe : Russia-Japan Territorial Dispute : Security, Defense Missile Issue Come First.)
Fait intéressant, le Kremlin s’est empressé de rechercher la compréhension du Japon. Poutine doit s’y rendre le 15 décembre.
Ces déploiements russes dans ses zones frontières occidentales et orientales ont été mis en place même avant que Poutine et Trump ne se rencontrent. À l’évidence, Moscou s’attend à ce que la normalisation des liens avec les États-Unis prenne du temps. Le porte-parole du Kremlin a dit mercredi : « Nos relations bilatérales sont au plus bas donc il est difficile de les rendre pires, mais nous espérons assurément la reprise d’un dialogue (avec la présidence de Trump) et nous allons entamer un processus lent et difficile pour faire reprendre un cours constructif à nos relations. »
L’élément important est que Moscou sera prudent. Malgré les signes prometteurs émis par Trump jusqu’à présent – y compris son interview au Times –, il doit vaincre la résistance acharnée des milieux de l’establishment américain dans la politique étrangère et stratégique et dans l’idée même d’améliorer les relations avec la Russie. La timidité de Trump à utiliser le mot de « remise à zéro » pour caractériser ce qu’il a à l’esprit, sera remarquée à Moscou.
– Le 24 novembre 2016
– Source : Indian Punchline
Traduction le Saker francophone
Par Youssef Hindi http://www.geopolintel.fr/article1913.html
mardi 15 novembre 2016
L’une des raisons qui a empêché les grands médias occidentaux de voir venir la victoire de Donald Trump est l’aveuglement idéologique de l’élite oligarchique et globaliste.
En effet, qu’ils appartiennent à la classe dirigeante politique, médiatique ou économico-financière, tous sont acquis à la cause de la globalisation économique dont le centre idéologique et historique est le monde anglo-américain.
L’URSS et le communisme international ont vu leur fin actée par la chute du Mur de Berlin. Peut-on affirmer que la fin de la globalisation économique a quant à elle été signée par l’élection de Donald Trump ?
C’est une interprétation qui fait sens si l’on en croit l’économiste américain James Kenneth Galbraith qui écrivait en 2008 :
« Si le credo soviétique était la planification centralisée, le nôtre était son contraire absolu : le culte du marché libre. Mais aux Etats-Unis la relation entre la théorie et la pratique politique n’est pas simple. A cet égard, la ressemblance avec ce qui se passait dans l’ancienne Union soviétique est troublante : l’action publique américaine n’était pas (et n’est pas) régie par les principes de la doctrine officielle. La doctrine sert plutôt de mythe légitimant – ce qu’on dit et répète aux enfants des écoles, mais que nul ne prend au sérieux au sein des cercles du pouvoir.
Quelle est l’utilité du mythe ? La même ici aujourd’hui qu’hier là-bas : il fixe des bornes à l’opposition, restreint la circulation des idées et réduit la sphère du débat acceptable… L’opposition respectable fait allégeance au système en acceptant son mythe directeur. » [1]
La réussite de Trump tient au fait qu’il n’a pas respecté ce mythe, ce dogme ; au contraire, il a attaqué frontalement le libre-échange généralisé en pointant du doigt ses effets sociaux et économiques désastreux.
La globalisation comme outil de domination oligarchique
Ainsi que l’a montré l’économiste James K. Galbraith dans son ouvrage L’Etat prédateur [2], le contrôle de l’économie américaine est passé des mains des industriels à celles des banquiers, remplaçant l’économie réelle par l’économie fictive avec la prééminence d’un capitalisme actionnarial et spéculatif [3] conduisant à une destruction du tissu industriel et à une financiarisation de l’économie américaine, et par suite de celle du monde.
L’Amérique est alors sortie de l’ère du paternalisme bienveillant de type fordien (Henri Ford) – mutuellement profitable aux détenteurs du capital et aux travailleurs – pour entrer dans celle de la rapacité bancaire, dévastatrice et apatride.
L’empire américain, dont l’appareil d’Etat a été investi par une oligarchie multiséculaire et nomade, ne pouvait, comme son prédécesseur anglais, contrôler le monde seulement par une puissante armée (hard power), mais devait s’adapter à un monde de plus en plus vaste (par sa démographie et l’émergence ainsi que la ré-émergence de puissances économiques et militaires), en appliquant les principes du soft power, et notamment en utilisant des relais de pouvoir comme les institutions internationales, les lobbies, les médias internationaux et les réseaux d’influences à caractère occulte, qui se chargeront de soumettre l’Humanité.
Les accords de Bretton Woods de 1944 qui devaient répondre à la crise de 1929 (qui a résulté de la spéculation financière), ont donné naissance à la Banque Mondiale et au Fonds Monétaire International. Ce qui déboucha de ces accords était conforme à la volonté des Etats-Unis, à savoir faire du dollar l’instrument de référence international et imposer la libéralisation des mouvements de capitaux.
Les règles du commerce international furent traitées durant la conférence de la Havane la même année. Les Américains avaient refusé de signer l’accord visant à réglementer le commerce sur des bases nationales et protectionnistes, eux qui étaient partisans du libre-échange.
L’Organisation mondiale du commerce qui née en 1995 se chargera de répondre aux désirs des Etats-Unis en favorisant le système de libre-échange généralisé, lequel a ironiquement frappé l’Amérique par le fléau qu’elle a infligé au reste du monde : la désindustrialisation et le chômage de masse.
Dans la présente séquence historique, il apparaît clairement que l’impérialisme américain ne se maintient que par la menace militaire (hard power) et la politique de subversion (révolutions colorées et guerres civiles)… Un tel système de domination ne peut, à l’échelle de l’histoire, ne durer que le temps d’un éclair ; chose qu’avait compris les empires traditionnels depuis l’Antiquité qui se maintenaient sur une base de légitimité, de « supériorité civilisationnelle », et d’acceptation des populations dominées.
La puissance impériale ainsi que ses institutions internationales se sont essoufflés malgré ou à cause de leurs efforts. Le passage d’un soft power sûr de lui à un hard power nerveux et fébrile est la manifestation d’une réelle et profonde faiblesse morale et matérielle qui touche le cœur même de l’empire.
L’échec de la globalisation a fait le succès de Trump
C’est cette catastrophe provoquée par le libre-échange et la financiarisation de l’économie – identifié par le peuple américain – que Trump a dénoncé et à laquelle il a proposé des solutions adéquates (que nombre d’économistes proposent depuis plusieurs années).
Répondre aux attentes du peuple américain, prendre en charge ses préoccupations, c’est de là que vient le succès de Donald Trump, et non pas sa personnalité et ses déclarations « racistes » qui auraient poussé les « petits blancs sous-éduqués de sexe masculin » à voter pour lui.
Une analyse de la sociologie électorale met en évidence que la réalité est bien loin de la propagande médiatique voulant masquer la victoire de la question socio-économique par celle du conflit racial [4].
Le journal Atlantico rapporte l’étude post-électorale qu’a faite le New-York Times et qui a démenti les sondages sur l’électorat de Donald Trump :
« Donald Trump a créé la surprise dans cette élection. Le New York Times analyse les évolutions des groupes sociologiques qui expliquent ce résultat, qui ont confondu les analystes.
L’oligarchie, via sa représentante Hillary Clinton – dont la campagne électorale a coûté trois fois plus chère que celle de Trump, et qui a de surcroît bénéficié du soutien de tout l’appareil médiatique –, a voulu imposer des thèmes sociétaux et raciaux – les noirs qui ont voté en faveur de la candidate de l’oligarchie ne furent pas conscients qu’ils allaient à l’encontre de leurs propres intérêts, notamment économiques [6] – pour contrer les thèmes socio-économiques. Et le fait que cette stratégie ait échoué en Amérique même, pays dont l’histoire et la construction se sont fondées en partie sur la race et un inégalitarisme structurel (héritée de la culture anglaise), est tout à fait significatif de la profondeur de la crise.
Le moment du choix : la globalisation ou la nation
Dans son ouvrage L’illusion économique [7] (1998), le démographe et historien Emmanuel Todd a mis en évidence la corrélation entre niveau d’éducation et progrès technique et industriel, générateur de la richesse matérielle d’une société. Partant de cette « loi » anthropologique et économique, le recul de l’éducation peut être interprété comme une des causes de la stagnation ou de la régression de la productivité et du progrès technique. Ce qui est le cas des Etats-Unis qui ont vécu un arrêt de leur niveau éducatif à partir du début des années soixante. Le résultat a été aussi brutal que mécanique : le ralentissement du niveau de productivité, suivie d’une décomposition industrielle, le tout faisant le lit de la régression économique.
Cette situation a été aggravée par le système de libre-échange mondialisé qui a mis l’industrie américaine face à des titans de la production quantitative et qualitative comme le Japon et l’Allemagne qui ont, dès les années soixante-dix, accentués – à cause du régime de libre-échange – la destruction de l’industrie Américaine [8].
Le succès de Donald Trump est la réaction à ce lent processus régressif qui a éloignée l’Amérique de son rêve.
Que la question économique se soit combinée à celle de la remise en cause du coûteux et inutile impérialisme est cohérent : le libre-échange est associé à l’impérialisme américain, lesquels s’opposent à l’isolationnisme géopolitique qui est couplé au protectionnisme économique.
C’est cette réalité que Donald Trump a su formuler en langage simple et compréhensif pour la masse.
Mais il ne faut pas s’attendre avec le Président Trump à un démantèlement du système impérial américain et des institutions de la globalisation. Cette énorme machine n’étant pas sous le contrôle de la Maison Blanche.
Toutefois, ce à quoi nous assistons est un tournant idéologique majeure qui aura un impact, d’une manière ou d’une autre, sur la réalité matérielle, car les structures et l’idéologie qui les sous-tend sont interdépendants.
Cette fenêtre historique qui vient de s’ouvrir offre à l’Europe en général et à la France en particulier, une marge de manœuvre (peut-être de courte durée) qui permettra éventuellement au Continent de s’émanciper de la tutelle américaine et ainsi réorienter sa politique (cette fenêtre providentielle, je l’annonçais dans un article de décembre 2015 [9], mais je ne m’attendais pas à la voir s’ouvrir aux Etats-Unis). Mais cela ne sera possible qu’après le balayage pur et simple de la classe politique française.
Les Etats-Unis étant, dans le monde occidental contemporain à l’avant-garde idéologico-politique – puisqu’elle est le centre de la production « culturelle » de l’Occident –, l’élection de Trump peut justement être l’impulsion d’une dynamique « révolutionnaire » ou d’un renversement en Europe de l’ouest. Aujourd’hui les européens exaspérés par une caste politique corrompue et par la dictature technocratique et bancaire du politburo de Bruxelles peuvent se dire « si les américains l’ont fait, c’est possible ».
La politique est l’art du possible.
Youssef Hindi est écrivain et historien de l’eschatologie messianique. Il est l’auteur des ouvrages Occident et Islam – Sources et genèse messianiques du sionisme. De l’Europe médiévale au Choc des civilisations et Les mythes fondateurs du choc des civilisations. 2016, Editions Sigest.
Voir en ligne : arretsurinfo.ch
[1] James K. Galbraith, L’Etat prédateur, 2008, éd. Le Seuil, 2009, p. 17.
[2] James K. Galbraith, op. cit.
[3] Sur le capitalisme actionnariale voir : Frédéric Lordon, La crise de trop, Fayard, 2009.
[4] Voir l’analyse du sociologue et essayiste Alain Soral au lendemain de l’élection de Donald Trump (9 novembre 2016) : http://www.egaliteetreconciliation....
[5] http://www.atlantico.fr/pepites/201...
[6] Voir la conférence qu’Emmanuel Todd a donnée quelques heures avant l’élection américaine*, le 8 novembre 2016 : https://blogs.mediapart.fr/xipetote...
[7] Emmanuel Todd, L’illusion économique : Essai sur la stagnation des sociétés développées, Gallimard, 1998.
[8] Emmanuel Todd, op. cit.
[9] Youssef Hindi, Attentats du 13 novembre, la politique et l’avenir de la France en question, 4/12/2015 : http://www.geopolintel.fr/article99...
Faut-il s'attendre à une nouvelle guerre mondiale ? A force de regarder le spectacle désolant des relations internationales contemporaines, de telles idées viennent spontanément à l'esprit. Mais sont-elles justifiées ? L'expert senior du Centre des recherches militaro-politiques Mikhaïl Alexandrov répond aux questions d'Inna Novikova, rédactrice-en-chef de Pravda.ru.
Mikhaïl Alexandrov. Pourquoi la Syrie est-elle tellement importante ? Cela semble être un point où les grandes contradictions planétaires s'interfèrent. Pour comprendre pourquoi aujourd'hui le conflit nucléaire est possible entre la Russie et les Etats-Unis, il faut saisir l'essence même de ce qui se passe en Syrie actuellement. A s'en tenir à la logique d'un conflit local, il devient insensé d'anticiper une montée aux extrêmes à cause d'une ville comme Alep. Mais en fait, il n'en est rien, car il s'agit d'un abcès qui traduit le conflit global sous-jacent entre les deux civilisations régissant le monde - orientale et occidentale. Ce conflit ne date pas d'hier : il dure depuis plusieurs siècles.
Voici venir maintenant le moment crucial où l'Occident s'est senti en perte des forces et de vitesse un peu partout à travers le monde. La multipolarité progresse, d'autres civilisation se renforcent : islamique, chinoise, hindoue. Et avant toute autre chose, ces tendances se révèlent dans l'économie. Alors pour soutenir ses positions économiques et politiques, l'Occident ne peut faire recours qu'à un seul outil - la force brute.
Qui alors peut contrer l'Occident sur le plan militaire? Jusqu'aujourd'hui rien qu'un seul pays en est capable - la Russie. Qui plus est, la civilisation russe est la seule à proposer activement un agenda différent c'est-à-dire une alternative dans les relations internationales. Ainsi, c'est l'avenir même de la civilisation occidentale qui est en jeu. S'ils n'arrivent pas à obtenir la suprématie militaro-politique globale, alors ils sont condamnés à perdre la bataille économique ce qui entraînera évidemment la nécessité de renoncer aux privilèges et préférences qu'ils s'étaient octroyées. Le niveau de vie dans l'Occident va baisser considérablement et ils ne seront plus en mesure d'influencer la prise des décisions au niveau mondial. Se posera alors la question sur leur vrai rang et le vrai rôle qu'ils sont appelés à jouer dans le monde contemporain.
La Russie ne peut absolument se faire à l'idée de l'aspiration de l'Occident à dominer le monde. En principe, cette aspiration contredit les intérêts de tout un chacun : ni en Afrique, ni en Amérique Latine, ni ailleurs personne ne semble le vouloir. Mais la plupart a peur de s'insurger parce qu'ils comprennent qu'ils seraient écrasés. L'Occident fait étalage tout le temps des exécutions exemplaires : la mise à mort de Milosevic, ou de Saddam Hussein, ou encore celle de Moammar Kadhafi.
Pourquoi la Russie est-elle intervenue alors aujourd'hui en Syrie ? Je crois qu'il s'agit d'un acte de vengeance de la part de Poutine à Obama pour ses exactions en Ukraine. Si les affaires allaient bon train en Ukraine, nous aurions pu ne pas intercéder en faveur de la Syrie. Mais Obama nous a lancé un défi : il a pénétré l'espace post-soviétique, a ourdi un coup d'État et a mis au pouvoir un régime franchement russophobe. Autrement dit, il a créé une situation qui menace ouvertement notre sécurité nationale. L'Ukraine n'est pas la Géorgie - c'est un territoire énorme où nous avons des intérêts substantiels. Alors notre direction a compris : si aujourd'hui nous nous laissons faire, si nous ne réagissons d'aucune manière, alors demain ils se mettront à démanteler la Russie, à son tour. Une réponse s'en est suivie : en Crimée, dans le Donbass et ensuite notre intervention en Syrie. Alors maintenant nous l'emportons en Syrie ce qui signifie qu'il existe une réelle possibilité d'arrêter nos « partenaires ».
- Arrêter qui : DAESH ou les Américains ?
Mikhaïl Alexandrov. Quel est le vrai but de la soi-disant opposition pro-américaine en Syrie ? Ils doivent renverser le régime d'Assad et créer un régime sunnite pro-occidental qui serait supervisé par les alliés des Etats-Unis, tels que l'Arabie Saoudite et le Qatar. C'est ces pays justement qui sponsorisent l'opposition sunnite en Syrie. Après quoi, le pays se transformera, à proprement parler, en allié de l'Occident et en un vivier du terrorisme international. Il est à comprendre que DAESH et al-Nusra (organisations interdites en Russie), c'est des organismes créés par l'Occident, la CIA dans le but de déstabiliser les régimes. Avant autre chose, le régime chiite, en Irak, quand il s'est mis à progresser en direction de l'alliance avec l'Iran.
A leur tour, les Américains ont commis une erreur en résolvant, de façon irresponsable, le problème du changement du pouvoir en Irak post-husseinien et, de fait, y ayant mis aux commandes, la majorité chiite unipolaire. Alors ce pouvoir a entamé, naturellement, le rapprochement avec l'Iran qui est un pays chiite. En Syrie, les mêmes chiites et les alaouites sont, eux aussi, au pouvoir. S'y est instauré alors « un axe chiite », extrêmement dangereux pour l'Occident. Il l'est parce que l'ensemble est présidé par l'Iran, un Etat souverain et indépendant qui milite pour un système polycentrique dans les rapports internationaux. L'Occident rêve d'« écraser » encore l'Iran.
En Irak, Les Etats-Unis ont créé DAESH pour enlever au gouvernement local chiite la possibilité de contrôler tout le pays et aussi pour faire pression sur ce gouvernement. C'est un peu comme s'ils disaient : « Si vous n'allez pas coopérer avec nous, nous nous en irons, mais alors DAESH se mettra à notre place et vous égorgera tous. Comme résultat, DAESH « s'est incrusté » en plusieurs villes, y a fait provision d'armes et ensuite s'est mis à faire la guerre en Syrie.
Il faut comprendre que DAESH, ou encore al-Nusra, ne sont que des instruments de la politique internationale de l'Occident. Alors quand certains de nos dirigeants proclament une sorte d'alliance avec l'Occident pour lutter contre le terrorisme, c'est une carabistouille. En fait, il s'agit d'un enjolivement diplomatique rendu public par notre direction, mais d'aucuns ont feint de le prendre au sérieux. A vrai dire, existe-t-il un moyen de collaborer avec ceux qui ont mis toutes leurs ressources médiatiques, diplomatiques et politiques au service des organisations terroristes, qui nous imposent un cessez-le-feu pour ravitailler al-Nusra en munitions et denrées alimentaires ? Il nous incombe tout bonnement d'achever l'opposition pro-occidentale à Alep et mettre fin à tout ce babil.
- Vous avez dit que la Syrie est notre vengeance pour l'Ukraine. Comment peut-on avoir ce genre de raisonnement ? Est-ce judicieux ?
Mikhaïl Alexandrov. J'entendais, bien sûr, une « vengeance politique ». Cela veut dire qu'il s'agissait de renvoyer l'ascenseur et point que notre président s'en est courroucé à titre personnel et a envoyé notre armée en Syrie. Non, ce n'est absolument pas une offense personnelle. Il s'agit d'une réponse stratégique sur l'échiquier dont le but est de châtier l'Occident et endiguer ses ambitions en lui montrant qu'il ne devait plus agir de la sorte, qu'il devait tenir compte de nos intérêts respectifs sinon il lui en cuirait à la puissance 100 et pas qu'en Syrie, mais dans bien d'autres régions du monde aussi.
- Je reviens vers l'une de vos déclarations que vous aviez faites dans une interview : « La Russie doit être prête à mener une guerre nucléaire et y vaincre ». Est-il vraiment possible de remporter la victoire dans un conflit nucléaire lorsque, selon vous, tout l'Occident se dresserait contre nous ?
Mikhaïl Alexandrov. Je vous explicite mon idée... Les Etats-Unis sont loin de nous et il leur est difficile de transférer une grande quantité de troupes ici. Quand bien même ils le réussiraient, que pourraient faire quelques 5.000 - 6.000 soldats débarqués en Sibérie? Ils y crèveront dans deux semaines. En Europe, ceux qui veulent nous faire la guerre ne sont pas tellement nombreux. Mais quoi, vous croyez vraiment que la Bulgarie en rêve ? Il se peut bien que leur Boïko Borissov (premier-ministre) le veut pour de bon, mais les autres Bulgares - j'en doute fort. Voter c'est une chose, mais guerroyer c'en est une autre. Les Tchèques, les Hongrois, les Slovaques - personne ne partira en guerre. Peut-être bien les Allemands, les Polonais et les Roumains aussi bien que certains pays du Benelux. A bien y regarder, il n'y a qu'une partie peu signifiante du monde occidental qui peut nous faire la guerre.
Alors il nous est parfaitement possible d'instaurer une parité quant à la quantité de troupes engagées au combat même s'ils réussissent à faire venir encore des troupes d'ailleurs. Mais c'est là que le facteur des armes nucléaires tactiques entre en jeu. Nous avons une supériorité dans ce domaine par rapport à l'Occident et nous pouvons détruire immédiatement toutes leurs grandes bases militaires, grands centres de production militaro-industrielle, centrales, ponts... Comme résultat, toute leur infrastructure militaire sera désorganisée. Alors comment pourraient-ils nous faire la guerre ? Vous croyez qu'ils viendraient chez nous comme ça, à pied, en hiver ?
- Mais ils ont bien un système de défense anti-aérienne ! Ils ont un tas d'armes sophistiquées !
M. Alexandrov. Sornettes !
- Et que faites-vous du concept de la frappe instantanée globale ?
M. Alexandrov. Mais quelle frappe globale ?!! Mais Bon Dieu, c'est d'une sottise ! Tout ça a été monté de toutes pièces par les experts militaires cherchant à semer la pagaille dans la société ! Parce qu'en fait, si on analyse bien les choses, les Américains n'ont pas d'armes pour un tel coup global-éclair. Leurs missiles de croisière de type conventionnel - « Tomahawks » - n'ont qu'une portée limitée de 1.500 km. D'où vont-ils les lancer si vous prenez le soin de regarder une carte ? Bon ! Ils peuvent encore atteindre les frontières de notre Etat. Mais, en vertu du Traité sur les missiles de courte et moyenne portée, ils n'ont pas le droit de les mettre en Ukraine aussi bien qu'en Pologne. Ils peuvent, bien sûr, les disposer dans les bassins de la mer Baltique et de la mer Noire, mais là-bas tout est dans le collimateur de nos systèmes de défense maritime. Une frappe instantanée globale est du domaine des contes de fées. On ne peut le monter au niveau actuel des technologies dont disposent les Etats-Unis.
Les théoriciens militaires discutent, bien sûr, de la forme que peut épouser un conflit militaire entre nous et l'Occident. C'est bien parce que l'administration d'Obama se comporte de façon imprévisible. Mais les militaires, quant à eux, raisonnent en termes concrets : ils ne gravitent pas dans les sphères stratégiques. A titre d'exemple, d'aucuns proposent de créer aujourd'hui une zone interdite de survol au-dessus de la Syrie. Ainsi l'Occident pourrait abattre nos avions-intrus et nous promettons de faire de même. Dans l'Occident, ils peuvent considérer qu'ils auraient là-bas plus de bases sur le terrain et qu'ils pourraient abattre tous nos avions. Mais nous n'allons pas nous laisser faire, c'est clair ! Nous les attaquerions alors dans les pays Baltes où nous avons une priorité stratégique. Un couple de nos divisions en viendra à bout en une seule journée en neutralisant leur seule brigade.
- Mais notre concept ne prévoit pas de frappe nucléaire préventive - juste une frappe en représailles. Quant aux Américains, leur Livre Blanc comporte bien le concept d'une frappe nucléaire préventive...
M. Alexandrov. Je vais vous mettre un peu les points sur les i... C'est vrai que nous avions dorénavant un concept de frappe en représailles, mais cela fut du temps du feu Brejnev quand nous avions une suprématie militaire par rapport à l'Occident en Europe. Nous n'avions alors aucun besoin de porter un tel coup les premiers. Aujourd'hui la situation a changé du tout au tout parce que l'OTAN possède maintenant un potentiel prédominant en Europe. Alors s'ils lancent une offensive, alors notre concept préconise bel et bien le premier tir des armes nucléaires tactiques. C'est écrit en lettres d'or dans notre Livre Blanc sur la Défense.
Pour ce qui est de l'Occident, c'est bien ses stratèges qui ne voudraient pas d'utilisation d'armes nucléaires tactiques, c'est pourquoi ils nous appellent à y renoncer. Pour la même raison Obama s'est mis à pérorer à la Brejnev de type « nous nous engageons à ne pas utiliser les armes nucléaires en premiers »...
- Je ne sais pour Obama, mais pour ce qui est de vous, vous raisonnez bien comme Ronald Reagan...
M. Alexandrov. Affirmatif ! C'était bien les propos de l'OTAN de naguère. Du temps de « la guerre froide », l'OTAN avait le concept d'une réponse souple. Cette doctrine prévoyait qu'au cas où nos troupes s'avanceraient en Europe Occidentale, les Occidentaux pourraient alors avoir recours aux armes nucléaires tactiques. Alors, de fait, nous n'avons fait qu'adapter leur concept à nos conditions locales. La roue a tourné et nous nous retrouvons dans leur situation, comme dans un miroir. C'est pourquoi ils n'ont aucune chance en cas d'une guerre en Europe.
- Mais certains généraux américains persistent à affirmer que la guerre avec la Russie sera rapide, mortifère et est presqu'inévitable.
M. Alexandrov. Je demande à voir comment ils veulent réaliser tout ça ! Quelles sont leurs ressources ? Où leurs coups seraient-ils dirigés ? Qu'ils nous expliquent comment ils veulent nous vaincre en deux semaines ! Hitler a, lui aussi, escompté faire éclater l'Union Soviétique en deux mois. Mais il avait au moins quelques arguments rationnels. Il espérait que les habitants de l'URSS abhorraient à un tel point le régime bolcheviste qu'au premier coup porté, il s 'écroulerait tout seul. Aujourd'hui c'est l'inverse : toute la nation a fait union autour du président. Vous n'avez qu'à passer en revue son taux de popularité à travers le pays. Ca joue surtout quand le président annonce une initiative politique et qu'il agit avec fermeté comme ça a été le cas en Crimée et en Syrie. Si, à titre d'exemple, il décide de renverser le régime de Kiev, pour ses menées contre le Donbass, j'estime qu'il n'en deviendrait qu'encore plus populaire.
- Des propos assourdissants sur la soi-disant occupation du Donbass et de la Crimée par la Russie, sur les gens qui y sont opprimés sont exprimés par la bouche des organismes internationaux du plus haut niveau. S'agit-il là-aussi d'un phénomène de « fissure tectonique civilisationnelle » ?
M. Alexandrov. Cela ne témoigne que du fait que nous avions eu tort d'adhérer à ces organismes. A titre personnel, ça fait belle lurette que je me suis prononcé pour le départ de la Russie de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) aussi bien que du Conseil de l'Europe à proprement parler.
C'est de vrais organismes russophobes. Notre présence à leur sein relève d'une sottise monumentale. Aujourd'hui nous sommes à couteaux tirés avec l'Occident, mais, en principe, ça ne date pas d'hier. Les réminiscences des idées pro-occidentales bourrées dans les crânes de nos compatriotes par Gorbatchev et Eltsine nous empêchent d'avancer. En fin de compte, déjà en 1812, les Français écrivaient que les Russes mangeaient les enfants. Qu'ils continuent ! Nous nous en soucions comme d'une guigne !
- Autrement dit, vous préféreriez que l'on se replie sur nous-mêmes ?
M. Alexandrov. Pourquoi se replier ? Il faut juste s'émanciper de l'Occident. Par exemple, l'Inde n'est pas un membre de l'APCE ; et l'Iran non plus ! A mon sens, l'Europe n'est qu'une notion géographique. Nikolaï Danilevski a poussé le bouchon en affirmant qu'il ne s'agissait point d'un concept civilisationnel. Il existe la civilisation occidentale, soit ! Et il existe la civilisation orthodoxe ! Nous sommes une civilisation orthodoxe et nous sommes différents, en maints points, par rapport à la civilisation occidentale. Cela fut la conclusion de tous nos grands philosophes.
Et ce n'est pas qu'un conflit entre l'orthodoxie et le catholicisme comme deux branches du monde chrétien. Il y va du conflit entre la civilisation orthodoxe dont le centre est incarné par la nation russe et la civilisation occidentale - polycentrique, mais unie par les valeurs en commun. Ce conflit civilisationnel est inéluctable. Il fut de tous temps et il va se prolonger dans l'avenir. Mais quelle forme épousera-t-il ? C'est là le problème !
Je ne comprends pas quel serait le résultat escompté si nous participons au fonctionnement de maints organismes européens... Comptons-nous gagner la civilisation occidentale ? Mais pour ce faire, il faudrait que nous renoncions à notre propre essence civilisationnelle, nous devrions les mimer, nous devrions reconnaître les mariages homosexuels, le féminisme et tout le reste qui fait partie de leurs « valeurs occidentales ». Et pourquoi faire ? Nous avons notre propre civilisation et nous devons en développer les principes. A ne prendre que les Iraniens qui sont sensiblement en retard par rapport à nous, qu'il s'agisse du domaine économique ou technico-scientifique, ou encore les Chinois, ces peuples ne veulent pas adapter leurs civilisations au creusent occidental. Alors pourquoi le ferions-nous ? Sommes-nous les cancres réussis pour copier sur les autres ? En revanche, ce qui est bien, c'est des échanges culturels, des recherches scientifiques en commun, mais pourquoi devons-nous coopérer avec les organismes où on nous passe régulièrement à tabac, ou bien, même si ce n'est pas toujours le cas, où l'on nous fait la morale ?!
Source http://www.pravdafrance.com/news/defense/02-11-2016/1303788-DEFENSE-0/
Un aberrant désir de guerre
Source : http://www.entrefilets.com/un_aberrant_desir_de_guerre.html
13/10/2016 Le pire n’est jamais garanti dit-on. Certes. Sauf que c’est exactement ce que l’on devait dire avant le déclenchement de la Première, puis de la Deuxième guerre mondiale. Et persiste pourtant cette sorte de naïveté qui fait penser à beaucoup que non, finalement non, «plus jamais ça», plus jamais 20 puis 60 millions de morts au nom de la Patrie, c’est-à-dire pour le profit des industriels et des banksters. Or depuis le coup d’Etat perpétré en Ukraine par les barbouzes de l’OTAN, l’Empire US et ses laquais européens n’ont eu de cesse de créer toutes les conditions d’une guerre majeure contre la Russie (et donc la Chine), utilisant parallèlement toute la vermine médiatique aux ordres de part et d’autre de l’Atlantique pour préparer les peuples à l’inéluctable, à l’indicible, en leur assénant quotidiennement leur dose de haine antirusse. Et les menaces ne cessent de gagner en intensité. Sans parler de l'épisode dérisoire d'un Flanby voulant traîner le Président russe devant la CPI, le Général Mark Milley, chef d’état-major de l’US Army, vient ainsi de déclarer à l'adresse de Moscou: «Je veux être clair pour ceux qui, dans le monde entier, veulent détruire notre façon de vivre, nous vous détruirons» ["We will beat you harder than you have ever been beaten before"] (1). Plus que jamais, le Bloc atlantiste sous commandement US est ainsi saturé d’un aberrant désir de guerre que renforce en lui l’évidence de son déclin.
La peur du vide
Deux facteurs principaux se conjuguent et se nourrissent l’un de l’autre pour pousser l’Empire US à vouloir affronter la Russie. D’une part, la restauration de la puissance russe et la crainte grandissante de voir s’opérer à terme une jonction entre Paris, Berlin et Moscou, alliance qui éjecterait de facto l’Empire de l’Eurasie (2) en lui coupant du même coup les vivres, notamment énergétiques.
Le deuxième facteur étant bien sûr le déclin de l’Empire lui-même, déclin dont l’accélération exponentielle ravage désormais toutes les structures sociales, économiques, militaires et politiques. Menacé de banqueroute, de guerre civile, de dislocation ou des trois à la fois, l’Empire est aux abois. De par son caractère explosif avec le seul choix entre une folle ardemment prête pour la guerre nucléaire et un trublion mondialement conspué, l’élection présidentielle à venir ne fera d’ailleurs qu’intensifier le mécanisme d’autodestruction en cours. Mais quoi qu’il en soit l’Empire n’entend manifestement pas mourir dans son lit (3).
Les canons prêts à «entamer leur rouge labeur»
Sur l’échiquier planétaire, le grand jeu prend dès lors une allure de plus en plus sinistre. L’Otan tient littéralement la Russie en tenailles et a déployé des dizaines de milliers d’hommes ainsi qu’un fantastique arsenal en Europe de l’Est. En Roumanie, les Etats-Unis viennent même d’inaugurer une installation de lance-missiles conçue pour une attaque nucléaire de première frappe. Du côté de la Mer de Chine, Washington souffle en même temps sur toutes les braises possibles entre Pékin, Taipeh, Tokyo, Séoul et Pyongyang.
Mais c’est d’une Syrie déjà ravagée par les flammes que se propagera manifestement l’incendie. L’Empire US et ses laquais y entretiennent sciemment une boucherie depuis plus de 5 ans, s’associant aux pires groupes terroristes qu’ils prétendent combattre, avec pour seule obsession de renverser Bachar al-Assad, et contrer ainsi la Russie et ses alliés iraniens ou du Hezbollah libanais.
En face, Vladimir Poutine avance méthodiquement ses propres pions, apparemment convaincu que l’Empire US est bel et bien décidé à l’affrontement final. Dans l’enclave de Kaliningrad, Moscou a donc déployé des missiles Iskander à capacité nucléaire. Dans ses deux bases syriennes, ses systèmes anti-missiles S300V4 «Antey-2500» (4) sont désormais opérationnels et sont capables de détruire aussi bien les avions prétendument furtifs des américains que leurs vieux missiles de croisière Tomahawk.
En attendant l’étincelle
Tout est donc en place pour le grand suicide final et ne manque que l’étincelle.
Or en matière d’étincelle, la bataille d’Alep en cours pourrait bien faire l’affaire. Devant l’efficacité de l’offensive lancée conjointement par le Président syrien et la Russie, le Bloc atlantiste est passé en mode panique. Pour protéger ses gentils terroristes qui s’y font littéralement désosser, l’Empire menace désormais de frapper directement les troupes du Président syrien. Or les Russes ont déjà prévenu qu’en ce cas ils riposteraient immédiatement (5).
Un affrontement direct entre les deux principales puissances nucléaires de la planète est donc désormais envisagé de part et d’autre (6).
Pour mémoire, la Première Guerre mondiale a coûté la vie à 1,15% de la population mondiale.
La Deuxième guerre mondiale a coûté la vie à 2,5% de la population mondiale.
Rapporté en 2016, ce pourcentage correspond à 200 millions de morts.
Se détacher de l’Empire, vite
Le pire n’est jamais garanti, dit-on. C’est vrai. Mais il est toujours possible. Et le présent texte n’a d’autre ambition que de le rappeler.
Car nous avons atteint aujourd’hui un point qui n’est peut-être pas encore celui du non-retour, mais qui commence à y ressembler fortement.
Reste à savoir si dans un Bloc occidental où la pègre dirigeante et son clergé médiatique semblent désormais possédés par le désir de guerre, les peuples accepteront une nouvelle fois d’être conduits à l’abattoir sans broncher.
En Europe, sur 500 millions d’âmes, seule une poignée de riches hallucinés placés aux postes clés sont prêts à suivre l’Empire US dans sa folie suicidaire.
N’est-il pas devenu urgent de les congédier ?
Mis en ligne par entrefilets.com le 13 octobre 2016
Depuis combien de temps annonce-t-on l’offensive contre l’antre de l’Etat Islamique, capitale d’Al Baghdadi, le calife invisible qui n’a d’autre réalité que dans les contes des journaux télévisés ? Un bon bout de temps, dirons-nous. Si longtemps en tout cas pour ressembler à une annonce de Microsoft pour une nouvelle version de Windows. C’est typiquement la méthode américaine de lancement d’un produit médiatique destiné à accaparer toute l’attention des médias mondiaux. Aujourd’hui nous y sommes, l’offensive tant attendue a commencé. Mais, ô surprise, l’aspect médiatique cachait bien autre chose.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il convient de rappeler encore une fois ce qu’est vraiment Daesh. Beaucoup d’analystes le considèrent encore comme un groupe de fanatiques voulant convertir le monde à leur idéologie religieuse. Si c’était vraiment le cas, ce ne sont pas des bombes ou des chars qu’il aurait fallu leur envoyer, mais une armée de psychiatres et d’infirmiers psychiatriques pour les soigner. Car sinon, comment imaginer que quelques milliers d’individus, ou même un million d’individus, puissent s’imaginer qu’ils peuvent conquérir sept milliards d’humains sur terre avec quelques lance-roquettes, quelques kalachnikovs et des bombes artisanales ? C’est absurde, d’autant plus que les stratèges de ce groupe ont montré qu’ils sont loin d’être des imbéciles et des utopistes.
Daech est une armée qui, comme toute armée, est composée de combattants organisés selon une certaine hiérarchie en une structure pyramidale, avec au sommet, des chefs, puis des sous-chefs et, tout en bas, des combattants formés de tous ceux qui sont recrutés un peu partout dans le monde. Il existe principalement trois raisons pour combattre : un salaire attractif, une idéologie (patriotisme, fanatisme religieux ou toute autre forme d’idéologie) et la peur d’être exécuté en cas de refus de combattre une fois recruté, ou de se retrouver en taule après désertion et retour au pays.
Que ce soit dans une armée conventionnelle ou dans celle de Daech, les soldats qui tombent au front ne sont animés que par tout ou partie de ces moteurs, mais ne savent généralement absolument rien des vrais raisons pour lesquelles ils se battent. Un analyste superficiel pourra se saisir de l’une de ces trois motivations, la motivation idéologique la plus couramment invoquée, pour dire que les combattants se battent pour la patrie, la liberté, la démocratie, le Wahhabisme ou autre, ce qui est souvent vrai. Mais la superficialité vient du fait que l’analyste en conclut aussitôt que la guerre dans laquelle est impliqué le combattant en question est une guerre idéologique, confondant les motivations du soldat à celles des décideurs.
Oublions donc les combattants et leurs diverses motivations et concentrons-nous sur les chefs et les vrais animateurs des groupes terroristes. Leurs liens avec des officiels US/OTAN et les services secrets occidentaux sont apparus peu à peu aux yeux de tous, et toutes leurs actions se font dans le cadre des objectifs du Pentagone/OTAN.
C’est en tenant compte de tout cela qu’il faut observer la fameuse offensive de Mossoul telle qu’elle nous est présentée, avec force publicité. Le premier constat est que le scénario est on ne peut plus cynique. Avant l’assaut de la ville, la coalition organise d’abord un couloir de retraite des terroristes pour les diriger en renfort vers la Syrie. Ce couloir ne concerne en rien les 1,5 millions de civils de la ville qui n’ont d’ailleurs d’autre choix que d’attendre sous les bombes larguées contre un ennemi qui n’est plus là et dont on a organisé la fuite. De quelle offensive parle-t-on ? A quoi sert-elle, sinon de mise en scène visant à masquer un transfert de forces de l’Irak vers la Syrie, avec pour bonus l’image redorée d’une coalition dans une de ces victoires bidons telles que les aime Hollywood ?
Tout pousse à penser que durant ces deux dernières années, Mossoul n’aurait été qu’une garnison gardant en réserve des combattants qui, en réalité, attendaient leur heure. Les semblants de combat et escarmouches qu’ils livraient contre l’une des plus formidables coalitions militaires, dont les bombes étaient guidées pour tomber dans le désert, n’auraient été destinés qu’à justifier la présence de cette coalition. Il est possible que cette offensive ait été déclenchée un peu plus tôt que prévu, mais il y avait urgence, comme pour l’Allemagne en 1945. Les Russes arrivent ! Evidemment, Mossoul a toutes les chances d’être occupée par les forces américaines après sa « libération », comme ça a presque toujours été le cas quand celles-ci « libèrent » une ville ou un pays. Avec une telle position stratégique (il suffit de regarder la carte), ce serait la cerise sur le gâteau.
Avic
Texte sans les annotations à retrouver sur Proche moyen-orient
« Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais ». Traditionnellement utilisée sur le mode ironique, cette phrase, devenue proverbiale, s’applique à propos de quelqu’un qui se dispense d’appliquer les conseils qu’il donne à autrui, selon une acception couramment admise. S’il y a bien un État dans le monde auquel cet adage va comme un gant, c’est bien aux États-Unis d’Amérique. Il convient parfaitement à leur politique étrangère, à leur diplomatie, à leur approche évolutive de la vérité, à leur conception originale du droit, à leur interprétation unilatérale de la mondialisation, à leur morale à géométrie variable, à leur manichéisme redoutable … Toutes choses que les faits objectifs révèlent depuis plusieurs années à celui qui veut voir et entendre.
La réalité comporte un réservoir d’exemples au cours des décennies et sur tous les continents dans lequel chacun peut puiser selon son bon plaisir pour alimenter un dossier à charge contre l’Amérique du nord, toutes administrations confondues. « La folie, c’est de recommencer les mêmes choses et en attendre des résultats différents » nous rappelle à bon escient Albert Einstein. Les Américains sont experts en ce domaine (Vietnam, Irak, Afghanistan, Libye…). Il faut le leur concéder bien volontiers cette qualité de constance dans l’erreur. A quelle conclusion parvient-on avec un minimum de bon sens au regard de l’expérience accumulée ? Qu’à trop vouloir jouer le justicier du monde, les États-Unis transforment le monde en injustice.
LES ÉTATS-UNIS OU LE JUSTICIER DU MONDE
La vision américaine du vaste monde est simple, pour ne pas dire simpliste. A l’instar des westerns, les Américains se présentent comme le juge partial des relations internationales qui les conduit à en être le cow-boy intraitable.
Le juge partial des relations internationales : les nouveaux Lucky Luke
Aux États-Unis, il n’y a souvent qu’un pas entre leur théorie originale et leur pratique assez peu orthodoxe des relations internationales.
Une théorie originale. Oints par le Tout puissant, l’Amérique caracole sur le char de l’histoire affublée d’une « destinée manifeste », d’une mission universaliste : diffuser le bonheur et la paix éternelle au monde entier par son « soft power » (sa langue dominante, ses idées baroques comme « la fin de l’histoire », sa cuisine indigeste, son mode de vie particulier, son cinéma hollywoodien et ses séries télévisées de quatre sous) mais aussi et surtout par son « hard power » surtout contre la volonté des récalcitrants au progrès « made in USA » (Cf. le concept de « Grand Moyen-Orient » développé en son temps par l’administration de George W. Bush). Les Américains pensent que l’histoire du monde, c’est l’occidentalisation (donc pour eux l’américanisation par un raccourci conceptuel) du monde. Le passé ne les intéresse guère. Le présent leur suffit tant il est chargé d’imprévus pour les absorber. Au diable les leçons de l’histoire, y compris les plus récentes.
Une pratique peu orthodoxe. Dans une posture morale, les États-Unis décrètent, du haut du Capitole, quels sont les Etats infréquentables devant être mis au ban de la société internationale pour leurs errements er leur refus de se soumettre à leurs Diktats. Ils sont qualifiés du terme peu flatteur « d’États voyous » (« Rogue States ») et sont accusés de former « l’Axe du Mal ». Rien de moins ! Aucun de ces concepts ne figure bien évidemment dans la Charte des Nations unies, étant empruntés au langage religieux et participant d’une approche manichéenne et morale opérant une distinction binaire entre le Bien et le Mal. Il va sans dire, mais cela va mieux en le disant, que Washington ne consulte aucun de ses chers alliés de l’OTAN (ses idiots utiles) pas plus que les membres du Conseil de sécurité de l’ONU (ces empêcheurs de tourner en rond) pour qualifier et tancer ces États. À quoi bon lorsqu’on est omnipotent et omniscient ?
Le cow-boy intraitable du « Rest of the World » : les nouveaux Reagan
Tous les États sont logés à la même enseigne ou presque. Il n’y a que la méthode qui change selon qu’on est gratifié du vocable d’ami ou d’ennemi de l’Amérique.
Les amis trompés. S’il est normal d’espionner ses ennemis, il est assez peu élégant de le faire pour ses plus proches alliés. C’est bien ce que fait la NSA qui d’écoute sans vergogne une quarantaine de chefs d’État et de gouvernement, y compris en utilisant les ambassades américaines à l’étranger (à Berlin et à Paris) pour tout entendre et tout savoir. La curiosité n’est-elle pas un vilain défaut ? Où sont les excuses et autres mots de compassion ? Vous repasserez dans la mesure où c’est pour votre Bien et pour vous protéger, à l’insu de votre plein gré, du Mal. Mais comment réagissent les dirigeants concernés ? Par quelques borborygmes incompréhensibles. Mais comment réagit l’Union européenne, si fière d’être porteuse de valeurs ? Au pire par un silence assourdissant de sa Commission, au mieux par une résolution dénuée de toute valeur contraignante de son Parlement. Même en prêtant une oreille attentive, le mot sanction est absent de la vulgate à 28. A l’OTAN, les alliés se prosternent servilement !
Les ennemis malmenés. L’Amérique a toujours besoin d’un ennemi, d’un diable (la Russie et la Corée du nord) pour cimenter une OTAN moribonde. « Le chaos ambiant est un effet d’aubaine ». Il ne fait pas bon contredire, résister aux États-Unis par les temps qui courent, les temps de la « guerre totale contre le terrorisme ». C’est une vision morale du monde aveugle face à la réalité. Quand on est différent, on attire la suspicion. Comme aurait dit Coluche : « il y a trop d’étrangers dans le monde ». La coercition la plus brutale suit de très peu le rappel à l’ordre peu diplomatique. La démarche coopérative n’est pas dans les habitudes de Washington. Injonction, sanction, punition – le plus souvent sans la moindre autorisation préalable du Conseil de sécurité – sont les trois mantras du remède classique américain aux maux de la terre ! Iraniens, Russes et autres Syriens en savent quelque chose. Ils finiront bien un jour par rendre gorge comme l’EIIL, après Al-Qaïda.
A l’usage, on voit bien les dangers d’une vision aussi manichéenne du monde. La vérité apparaît forcément un jour et elle est plus que dérangeante.
LES ÉTATS-UNIS OU LE MONDE DE L’INJUSTICE
Rendons à César ce qui est à César. L’Amérique du nord excelle, depuis plusieurs décennies au moins, dans l’art consommé de la manipulation du fait et du droit mais également dans la pratique de l’exportation hors de ses frontières des crises et de la guerre avec le soutien de quelques « idiots utiles » adeptes de la théorie de la servitude volontaire chère à La Boétie.
Le manipulateur du fait et du droit : une grande expertise
Une certaine idée des faits. La frontière jusque-là naturelle de la virtualité et de la réalité, du faux et du vrai est abolie. Mais il y a pire encore. Le mensonge est élevé au rang de sport national et plus c’est gros, plus ça passe. Les États-Unis sont les meilleurs adeptes du mentir-vrai. Chez eux, « les mots mentent comme ils respirent », pour reprendre la formule de Romain Gary. Il faut attendre plusieurs années pour que Colin Powell reconnaisse, confus, que les preuves de la présence d’armes de destruction massive en Irak n’ont jamais existé en dépit de ce qu’il déclarait devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Il faut attendre un rapport accablant de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour que les États-Unis admettent l’existence des vols secrets de la CIA pour transporter des prisonniers vers quelques contrées disposant d’une réelle expertise en matière de torture. Il faut attendre les révélations d’un grand quotidien américain pour que la Maison Blanche reconnaisse le versement d’une rançon en contrepartie de la libération d’otages détenus en Iran alors même que la position officielle est que Washington ne verse jamais de rançons. Il faut attendre la publication d’études indépendantes pour que les Américains reconnaissent qu’ils ne pouvaient avoir tué plus de djihadistes qu’il n’en existait en Irak et en Syrie. Et cette liste n’est pas exhaustive, mais tout simplement indicative ! On croit rêver s’agissant d’un pays qui donne des leçons à la terre entière. Mais, ce n’est pas tout !
Une certaine idée du droit. Là encore, on peut dire que les Américains ne manquent pas d’air, eux qui se présentent comme des parangons de vertu en matière juridique tant leur Constitution s’apparenterait aux tables de la loi. Pour faire simple, on peut dire que la conception juridique du droit laisse rêveur les tenants d’un droit international fondé sur le principe de l’égalité souveraine entre États tel qu’énoncé par la charte de l’ONU. D’un côté, le droit américain s’applique en dehors du territoire, jouissant d’une forme d’extra-territorialité. Cela leur permet d’écarter des concurrents commerciaux étrangers trop bien implantés dans un pays. De l’autre, les Américains ont toujours été et sont toujours réservés à l’idée que le droit leur soit applicable comme au vulgum pecus qu’il s’agisse de la Cour pénale internationale, de l’interdiction des essais nucléaires, du droit international humanitaire, du climat…. Cela leur permet de procéder à des assassinats ciblés de terroristes aux quatre coins du monde, de bombarder des hôpitaux de MSF en Afghanistan en toute impunité. Par une curieuse ironie de l’Histoire, l’Amérique récuse aujourd’hui les principes cardinaux de la mondialisation qu’elle a mise sur pied hier dans la mesure où elle ne leur apporterait plus aujourd’hui les dividendes qu’elle en escomptent sur le plan économique, financier et social (Cf. les propositions de Donald Trump et Hillary Clinton). Barack Obama va jusqu’à faire la leçon aux Chinois en matière de droit maritime international !
L’exportateur de crises et de guerres et les idiots utiles : une grande expérience
Une exportation des crises. La vie internationale est fondée sur le respect de règles communes souscrites volontairement par les États. Hors, les Américains s’autorisent à s’exclure du droit commun dont ils exigent l’application par le reste du monde. De facto, si ce n’est de jure, ils seraient hors-la-loi. Que de crises exportées par les États-Unis hors de ses frontières au cours des dernières décennies sans qu’ils n’aient jamais eu à en rendre compte devant un quelconque tribunal pénal international ou une cour pénale internationale ! La plus violente est la crise financière née de la bulle spéculative autour des « subprimes » qui a failli emporter le monde à partir du moment où elle s’est répandue comme des métastases. Où sont les coupables ? Ils ont rarement été poursuivis et condamnés comme cela aurait été normal. Que font-ils ? Ils emploient comme consultant « Brexit », l’ancien président de la Commission européenne, José Manuel Barroso sans que personne n’y trouve à redire. Non moins spectaculaire est la crise environnementale qui secoue la planète. Les États-Unis sont, avec les Chinois, les plus gros pollueurs de la terre. Ils ratifient le texte de la COP21 après avoir lutté pour qu’il ne contienne aucun engagement contraignant. Donald Trump annonce qu’il s’en dégagera en cas de victoire à l’élection présidentielle. Ces deux exemples illustrent parfaitement le rôle néfaste joué par les Américains dans la dérégulation et la déstabilisation de la vie internationale.
Une exportation des guerres. Dans ce domaine, les Américains disposent d’une expertise incontestable et incontestée. C’est d’abord la guerre au sens militaire que Washington apporte en présent aux peuples ombrageux, peu portés à la servitude volontaire. Une fois l’ordre remis, les États concernés ont le plus grand mal à s’en remettre (Irak, Afghanistan, Libye…) tant les traumatismes y sont profonds. Avec les Américains, il y a une grande chance que le remède soit pire que le mal tant ils ne comprennent rien aux pays dans lesquels ils interviennent. Nous en mesurons aujourd’hui tous les effets négatifs sur la sécurité internationale. C’est ensuite la guerre au sens financier du terme. Les guerres financières Ce sont de vraies guerres qui tuent et paupérisent les peuples, comme on l’a vu en Grèce. Cette situation stratégique inédite s’explique par la nouvelle puissance des acteurs financiers : banques d’affaires, fonds d’investissements, nombreux milliardaires issus de Wall Street. Depuis les années 1980, une finance dérégulée, mondialisée et en partie toxique s’est bâti de vastes principautés immatérielles, surplombant les économies et lançant des raids sur des États captifs et des populations tétanisées. Malgré sa responsabilité dans la crise de 2008, la finance-puissance continue d’étendre son emprise, usant de stratégies empruntant à l’art de la guerre. C’est enfin, le concept de « guerre des civilisations » dont ils sont les exportateurs à travers les thèses culturalistes de Samuel Huntington.
Les « idiots utiles ». Le tableau présenté ci-dessus a simplement valeur d’exemple. Il ne prétend pas à l’exhaustivité tant la liste des errements de l’Amérique au cours des dernière années est impressionnante pour celui qui observe la réalité quotidienne avec distance tout en ne méconnaissant pas les succès d’Outre-Atlantique dans les domaines les plus variés. Être allié loyal des États-Unis ne signifie pas nécessairement être son « idiot utile », être aligné sans la moindre réserve, sans la moindre interrogation sur les faits et sur leurs motivations, parfois les plus cyniques ! A cet égard, le retour dans la « famille occidentale » et la réintégration de la structure militaire intégrée de l’Alliance atlantique par Nicolas Sarkozy (que le général de Gaulle avait décidé de quitter) n’ont ni grandi, ni rendu plus forte la France sur la scène internationale. Au contraire ! Elle a affaibli son crédit diplomatique dans nombre de pays du sud. « Pour l’heure, la brouette transatlantique accompagne, en queue de convoi, les pyromanes américains partout où il leur prend l’envie de mettre le feu : le Kosovo, l’Irak, la Libye, la Syrie, l’Ukraine. Leurs voyages sont nos voyages ; leurs conflits sont nos conflits, leurs aventures, nos aventures. C’est la définition même d’un protectorat ».
En définitive, sommes-nous conscients de la vacuité des discours américains sur les grandes crises internationales actuelles et passées ? Les seuls discours qu’ils soient capables de tenir pour cacher leur incapacité à comprendre le monde et à agir sont les discours éclairés rédigés par leurs communicants (« spin doctors »). Ceci constitue le signe manifestes de l’emprise de l’empire de la com sur leur politique étrangère et leur diplomatie.
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« LE MONDE MALADE DE L’AMÉRIQUE »
« Même un égal, lorsqu’il atteint son objectif, cherche à devenir plus fort et, dès qu’il l’est devenu, cesse d’être fiable ». Les lecteurs avertis de Machiavel, Clausewitz et autres Sun Tzu ne trouveront peu de nouveauté dans l’analyse de la position américaine dans le concert des nations, tout juste la confirmation qu’à Washinton la politique a toujours été envisagée avec une méthode froide, cynique, débarrassée de toute morale. En ce début de XXIe siècle, les Américains n’échappent pas à la règle et commencent, lentement mais sûrement, à payer la facture de leur désamour par le « Rest of the World » comme ils le qualifient avec dédain et supériorité. Et cette facture risque d’être lourde lorsque le monde découvrira, le jour venu avec effroi (Horresco referens), qu’il est « malade de l’Amérique ». Comment l’Histoire jugera l’Amérique ? La réponse la plus récente de son vice-président, Joe Biden à cette question est faible, voire risible.
Sommes-nous conscients de cet état de choses ou sommes-nous des somnambules ? Sommes-nous disposés à engager un authentique débat sur le sujet ? Pouvons-nous y changer quelque chose individuellement (en tant que France) ou collectivement (en tant qu’Union européenne) ? Le voulons-nous ? Est-ce faisable et envisageable dans un monde frappé au seau du conformisme et du panurgisme médiatique ? En dernière analyse, les États-Unis sont atteints d’un phénomène bien connu des psychologues et autres psychiatres, à savoir celui du transfert dont l’un des deux mécanismes constitutifs se nomme projection. Elle consiste à attribuer à autrui des caractéristiques qui lui sont propres et qu’il refuse en lui. Sans nul doute, et même s’il y a une part d’exagération dans ces paroles, le fond en est juste : États-Unis ou États voyous ?
Repris par Comité Valmy avec l’aimable autorisation de l’auteur
Dès le lendemain des attentats, une chape de plomb s’est abattue. En guise d’explication, il fallut se contenter d’une sorte de western planétaire. A quoi bon tenter d’expliquer l’événement puisque l’essentiel était de punir les coupables ? Exit l’inquiétante complexité d’un monde que l’on répugne à comprendre, place à l’affrontement binaire du Bien et du Mal. L’événement fut vidé de sens, projeté dans l’imminence d’une croisade dont le président américain, ce justicier mondial, prenait la tête au nom d’une Amérique meurtrie.
Privée de toute autre option intellectuelle, l’opinion américaine se trouva confortée dans son habituelle bonne conscience : mais pourquoi donc nous veut-on tant de mal, nous qui apportons la prospérité au monde ? Le plus étonnant, au lendemain de l’attentat, fut l’étonnement américain. Cette nation qui impose son hégémonie au reste du monde découvrit alors, stupéfaite, qu’on pouvait la détester. On se demande ce qui a davantage blessé l’opinion d’outre-Atlantique : le nombre des victimes ou l’insoutenable réalité de ce qui aurait dû rester du domaine de la fiction ?
Tout, dans la tragédie du 11 septembre, était pourtant de nature à susciter l’autocritique de l’hyperpuissance américaine. Les attentats ont stupéfié le monde par leur caractère spectaculaire et leur terrifiante efficacité. Dotée de moyens dérisoires, une poignée de tueurs a infligé à l’Amérique une humiliation sans précédent. Dans un univers bardé d’électronique de pointe, quelques terroristes ont fait la démonstration que l’ampleur des dégâts ne dépendait pas de la maîtrise des technologies dernier cri : un manuel de pilotage, un solide entraînement et des cutters ont fait l’affaire. Ils ont suffi, en tout cas, à provoquer au sein de la première puissance du monde un véritable cataclysme, ridiculisant les systèmes de protection sophistiqués dont elle s’entourait à coup de milliards de dollars.
L’objectif de cet hyper-terrorisme suicidaire était d’infliger des pertes humaines considérables en frappant des cibles civiles et militaires. Mais rien ne fut laissé au hasard. En frappant les USA de façon aussi brutale, les terroristes ont voulu délivrer un message sans équivoque. Symboles de la puissance politique, économique et militaire des Etats-Unis, la Maison Blanche, le World Trade Center et le Pentagone ont été choisis avec le même discernement que celui qui présidait aux frappes chirurgicales administrées par l’aviation US au Moyen-Orient.
Dans la brutalité des frappes aériennes, les Américains apprécient la rigueur qui s’attache au châtiment, ils goûtent la distance qui rend les opérations invisibles, le côté abstrait d’une lutte où l’éloignement permet d’accréditer l’image d’une guerre aseptisée. Puritain lui aussi, et rejeton d’un capitalisme alimenté par les pétrodollars, l’ex-agent de la CIA Oussama Ben Laden a retourné contre l’Amérique la même violence manichéenne. Comme un boomerang, elle s’est précipitée au visage des apprentis-sorciers qui l’ont fait naître.
En inventant l’hyper-terrorisme suicidaire par voie aérienne, Ben Laden a créé le dernier avatar de la barbarie moderne. Mais en retournant le feu céleste contre le « Grand Satan », il a cherché à humilier les Etats-Unis en faisant payer au prix fort, par des milliers d’innocents, la facture de son audace meurtrière. Et en frappant d’abord des civils, il a inversé, au détriment des Américains, leur doctrine hypocrite des frappes chirurgicales et des dégâts collatéraux.
Les USA portent une écrasante responsabilité dans la montée en puissance du djihadisme. Ce dernier fut l’antidote à l’influence communiste, patiemment distillé par la CIA au temps de la guerre froide. Puis il survécut à la fin de l’affrontement Est-Ouest, au gré d’une stratégie opaque. Cette connivence entre l’Amérique puritaine et l’idéologie fondamentaliste sunnite ne date pas d’hier, et elle est directement liée à un enjeu qui n’a rien de métaphysique : la maîtrise des ressources pétrolières.
La découverte des principaux gisements de la péninsule arabique permit de sceller une alliance durable entre les Etats-Unis et la monarchie saoudienne. Les compagnies pétrolières d’outre-Atlantique en furent les principales bénéficiaires. Entre les Américains et les Saoudiens, une convergence d’intérêts économiques explique la permanence de leur alliance à travers les vicissitudes du siècle. Mais la doctrine rétrograde de la monarchie wahhabite présentait aussi un gage de conservatisme face à la double menace qui se profilait à partir des années 1950 : le communisme et le nationalisme arabe.
Rempart contre l’influence soviétique, antidote au nationalisme arabe, opportun concurrent de la subversion chiite : les stratèges de la CIA ont prêté à l’islamisme sunnite toutes les vertus. En échange du pétrole, les Américains laissèrent le champ libre à la monarchie wahhabite, qui finança dans l’ensemble du monde musulman un immense réseau d’officines obscurantistes. Une Arabie saoudite ultra-conservatrice sur le plan intérieur et docile sur le plan extérieur constitua, au côté de l’alliance avec Israël, le pivot de la politique américaine au Moyen-Orient.
En soutenant la lutte armée des factions islamistes en Afghanistan, les Américains et leurs alliés wahhabites ont mis le doigt dans l’engrenage. Avant même l’intervention russe, ils livrèrent des armes aux adversaires du pouvoir pro-soviétique. Pendant dix ans, Washington versa une moyenne annuelle de 600 millions de dollars aux adeptes du djihad contre le Satan soviétique. Les USA, au lendemain de l’effondrement russe, persistèrent dans leur appui politique et financier à la nébuleuse djihadiste. Cédant au vertige du succès, Washington s’extasia sur les performances de la guérilla islamiste qui, en Afghanistan, fit vaciller l’Union Soviétique.
La créature, toutefois, ne tarda pas à se retourner contre son créateur. Au nom de la lutte contre l’Union Soviétique, les responsables américains ont favorisé les extrémistes. Zbigniew Brzezinski et ses émules croyaient qu’ils pourraient se débarrasser des djihadistes après usage. Ils restèrent passifs devant une radicalisation abolissant toute différence entre l’Est et l’Ouest et laissèrent fermenter le bouillon de culture du djihad afghan. Washington avait enfanté Al-Qaida. Cette querelle de famille fut soldée le 11 septembre.
Mais cette politique n’était pas une erreur. Elle fut délibérée. Selon Peter Dale Scott, une partie de l’appareil sécuritaire des Etats-Unis protégeait deux des auteurs des attentats du 11 septembre, et il est probable qu’elle ait sciemment laissé agir les terroristes. « Permettez-moi de suggérer qu’il existe au moins trois étapes distinctes dans les attentats du 11 septembre : les détournements d’avions, les frappes contre les bâtiments et l’effondrement surprenant des trois immeubles du World Trade Center. Il est possible que le groupe de liaison de l’équipe « Alec Station » (CIA) ait envisagé uniquement la première étape sans envisager les deux suivantes » (« L’Etat profond américain », Editions Demi Lune, 2015).
Ainsi il est probable que ces attentats aient bénéficié de la complicité d’un certain nombre d’agents des innombrables services de sécurité qui fourmillent dans le pays, se livrant à d’incessantes querelles et à de téméraires combinaisons au détriment de la sécurité des citoyens. Sur la base de ces faits extrêmement troublants, on ne saurait évacuer la possibilité, dès lors, que les dirigeants du pays eux-mêmes aient couvert ces agissements occultes et accueilli l’événement du 11 septembre comme une formidable opportunité.
L’émotion populaire, en effet, ne pouvait que créer les conditions propices à un basculement du pouvoir vers les zones secrètes de l’Etat profond. Elle ne pouvait que justifier une politique agressive à l’échelle planétaire qui était programmée depuis plusieurs années par ses principaux représentants. On peut toujours hausser les épaules, mais il y a un inconvénient : c’est exactement ce qui s’est passé.
Les attentats ont donné le coup d’envoi d’une offensive militaire néo-conservatrice sans précédent. Et cet interventionnisme a eu pour effet de relancer à son tour de façon exponentielle le terrorisme planétaire qu’il prétendait éradiquer. Le 11 septembre 2001 restera dans les annales comme un événement-prétexte qui inaugura, de fait, la mise en œuvre d’une stratégie du « chaos constructif » à grande échelle dans laquelle le cynisme des dirigeants US atteignit des sommets.
A côté des terroristes qui servirent de petites frappes, les principaux responsables de ce crime de masse ne sont autres, en réalité, que ces marchands d’armes, ces financiers véreux et ces politiciens sans scrupule qui auront exploité jusqu’au bout, depuis quinze ans, le précieux filon de la guerre contre la terreur. Et cette exploitation est d’autant plus scandaleuse que cette prétendue guerre contre la terreur ne fut jamais autre chose que son contraire.
Bruno Guigue
11 septembre 2016
La lettre de Léosthène - le 3 septembre 2016, n° 1135/2016
mercredi 7 septembre 2016, repris par Comité Valmy
Avec l'aimable autorisation de l'auteur
L’avenir, dit Brzezinski - il pense aux vingt prochaines années, « pourrait bien être la dernière phase des alignements traditionnels et familiers dans lesquels nous avons grandi confortablement, et les réponses doivent être construites aujourd’hui » (1). On connaît le vieux géopoliticien américain, 88 ans, conseiller du président Carter (1977-1981) et resté une référence majeure de la pensée stratégique des Etats-Unis. Vision expliquée au public dans un Grand échiquier publié en 1997 et réactualisé en 2004 : la chute de l’Union soviétique en 1991, marquait « l’étape finale de l’ascendance rapide d’une puissance de l’hémisphère occidental, les Etats-Unis, en tant que seule, et en réalité première véritable puissance globale ». Une ascendance qu’il avait anticipée, affirmant - dès les années soixante - que les blocages de la société soviétique ne permettraient pas à l’URSS, en dépit de sa puissance militaire et diplomatique, de rivaliser à terme avec les Etats-Unis.
Presque vingt ans plus tard, l’expert reprend la plume avec un constat : « Comme l’ère d’une dominance globale s’achève, les Etats-Unis doivent prendre la main pour redéfinir l’architecture du pouvoir mondial ». L’objectif ? Eviter le chaos au monde qui vient - en préservant au mieux les intérêts américains.
Peu commenté lors de sa parution à la mi avril, son texte est repris et commenté fin août dans Counterpunch par un Mike Whitney qui note : « Bien que l’article de Zbigniew Brzezinski publié dans The American Interest et intitulé Vers un réalignement mondial ait été largement ignoré des médias, il montre que des membres puissants de l’establishment ne croient plus que Washington puisse l’emporter dans sa quête pour étendre l’hégémonie américaine sur le Moyen-Orient et l’Asie » (2). Avec une question : « Mais pourquoi cette ère » de dominance globale « s’achève-t-elle aujourd’hui ? Qu’est-ce qui a changé depuis 1997 quand Brzezinski se référait aux USA en tant que ’puissance suprême du monde’ ? ». Bonne question. Brzezinski se garde de nous dire en quoi la « puissance suprême », dont « aucun Etat dans le futur proche ne sera vraisemblablement susceptible d’égaler la supériorité économique et financière » est responsable de la situation actuelle. Il dresse simplement un constat en cinq points qu’il appelle « cinq vérités fondamentales » qui nécessitent une redéfinition de la stratégie d’une Amérique qui n’est (premier point) « plus le pouvoir impérial mondial ».
Dans l’ordre, ce qui n’est pas innocent, vient ensuite la Russie qui vit, dit-il « la dernière phase convulsive de sa dévolution impériale. Un processus difficile ». Sans qu’il soit exclu, « si elle agit avec prudence et intelligence, qu’elle ne puisse devenir à terme un Etat-nation européen dominant ». Une remarque intéressante, en complète rupture avec les thèses des néoconservateurs et de tous ceux qui voient au contraire, y compris en Europe, Vladimir Poutine chercher à reconstituer l’empire russe. Notons au passage que nous revenons ici, au fond, à l’histoire européenne, y compris, en arrière plan non-dit, à la traditionnelle confrontation entre les intérêts allemands et russes autour des pays de l’est de l’Europe – et à la possibilité d’un rapprochement franco-russe (ce qu’on appelait une alliance de revers). Ajoutons que l’Europe sous sa forme actuelle (point quatre) « n’est pas et ne deviendra vraisemblablement pas une puissance mondiale ». Pour Zbigniew Brzezinski, la messe est dite : telle qu’elle est aujourd’hui, l’Europe est sortie des poids lourds du monde – sauf fonctions utilitaires, en appui des intérêts américains.
Mais voyons le point trois, la Chine. Elle « émerge continûment, bien que moins rapidement qu’elle ne l’a fait, comme la future puissance égale de l’Amérique et vraisemblablement sa rivale ; mais, pour le temps présent, elle s’efforce de ne pas lui opposer de défi ouvert. Du point de vue militaire, elle semble chercher à percer avec une nouvelle génération d’armement tout en renforçant patiemment se puissance navale encore très limitée ». Il y a dans ce constat quelque chose d’incontournable : la Chine est et sera. Mais ? Mais « son succès économique demande de la patience et la conscience de ce que la précipitation politique pourra provoquer en matière de dégâts sociaux ». Une allusion aux Royaumes combattants chinois (Ve siècle à 221 av. J.-C) ? Et puis, il y a le chaos issu du Moyen-Orient (point cinq) qui pourrait, s’il n’était pas contenu, « contaminer les territoires du sud et de l’est russes aussi bien que les parties ouest de la Chine » (on pensera au Xinjiang). Suit un long développement sur les raisons du chaos dans « le monde musulman postcolonial » qui n’est probablement pas de la plume de Brzezinski – mais de celle d’un assistant cité en fin d’article. L’essentiel est que ce chaos s’exporte « au-delà du monde musulman – et dans le futur possiblement depuis d’autres parties de ce qu’on a coutume d’appeler le Tiers monde ». Et que donc les Etats-Unis, la Russie et la Chine (comme « principal partenaire ») ont intérêt à travailler ensemble à contenir ce désordre, en lien avec les puissances régionales pertinentes, « Turquie, Iran, Egypte et Arabie Séoudite si le pays peut détacher sa politique étrangère de l’extrémisme wahhabite ». Sachant que « nos alliés européens, dominants dans la région par le passé, peuvent aider à cet égard ».
Il y a des non-dits dans ce tableau. Relevons avec Mike Whitney que Brzezinski n’aborde pas ce qui pourtant fonde la puissance américaine, le règne du dollar, « les dangers d’un système qui ne serait plus basé sur le dollar progressant dans les pays en développement et les pays non-alignés qui remplacerait l’oligopole de la Banque centrale occidentale. Si cela arrivait, alors les USA perdraient leur mainmise sur l’économie mondiale » (2). Mais il y a aussi ce silence étourdissant sur le chaos interne aux Etats-Unis – et sur les perspectives ouvertes avec l’élection présidentielle. « Malheureusement », constate Mike Whitney, « l’approche plus prudente de Brzezinski ne sera probablement pas suivie par la favorite Hillary Clinton, qui croit fermement à l’expansion impériale (de son pays) par la force des armes ». Pour Donald Trump, remarquait en février dernier le spécialiste de l’histoire américaine Justin Vaïsse pour le Figaro (3) « sa position tranche totalement avec l’interventionnisme observé ces dernières années au sein du parti républicain. Il a adopté une realpolitik qui tente de s’accommoder de ceux que l’Amérique désigne habituellement comme ses adversaires, à commencer par Poutine. Depuis les années 1980, Trump a remis en cause le consensus du ‘plus c’est mieux’ (more is better), selon lequel plus intervenir, c’est mieux. Obama lui-même avait déjà pris ses distances avec l’interventionnisme systématique, sinon en se retirant, du moins en changeant de stratégie au Moyen-Orient et au Maghreb ». Sondages contradictoires aidant (4), nous n’avancerons aucune hypothèse. Notons seulement que Zbigniew Brzezinski s’exprime comme si les Etats-Unis échappaient au désordre général, pôle de stabilité dans un monde mouvant – ce qui n’est pas le cas.
Néanmoins, l’appel de Brzezinski est impérieux : « L’alternative à une vision constructive, et spécialement la recherche d’une issue militaire et idéologique imposée unilatéralement ne peut que prolonger inanité et autodestruction. Pour l’Amérique, la conséquence peut être un conflit durable, de la lassitude et même possiblement un retrait démoralisant sur un isolationnisme pré-20ème siècle. Pour la Russie, cela pourrait signifier une défaite majeure, augmentant la probabilité d’une subordination, d’une manière ou d’une autre, à la prédominance chinoise. Pour la Chine, cela peut annoncer une guerre, non seulement avec les Etats-Unis mais aussi, peut-être séparément, avec le Japon ou l’Inde, ou les deux. Et, dans tous les cas, une phase longue de guerres ethniques, quasi religieuses, au travers de tout le Moyen-Orient avec un fanatisme auto-justifié qui engendrerait des effusions de sang dans et hors de la région, et une cruauté croissante partout ».
Que l’on épouse ou non la vision du grand sachem américain – et qu’en pensent Russes et Chinois ? - son texte donne à réfléchir. Nous aurons une réserve, pourtant – la même que celle de nos confrères de la Vigie (5) dans leur dernière livraison : « Le monde se défait. Tout se passe comme si l’Occident était ce personnage de Tex Avery, qui court dans le vide sans s’être rendu compte qu’il avait franchi le bord du précipice. L’équilibre n’est plus qu’un souvenir et la notion même de domination ou d’ordre mondial a vécu sous nos yeux ».
Une seule certitude : Zbigniew Brzezinski sait que le monde se défait – celui-là même sur lequel il a pesé. Son repentir est-il trop tardif ?
Hélène Nouaille
Notes :
(1) The American Interest, vol.11 n° 6, le 17 avril 2016, Zbigniew Brzezinski, Toward a New Realigment
http://www.the-american-interest.com/2016/04/17/toward-a-global-realignment/
Son livre (The Grand Chessboard) est téléchargeable en anglais :
http://www.takeoverworld.info/Grand_Chessboard.pdf
(2) Counterpunch, le 26 août 2016, Mike Whitney, The Broken Chessboard : Brzezinski Gives Up on Empire
http://www.counterpunch.org/2016/08/25/the-broken-chessboard-brzezinski-gives-up-on-empire/
(3) Le Figaro, le 2 février 2016, Eléonore de Vulpillières, Entretien avec Justin Vaïsse, Zbigniew Brzezinski, le stratège méconnu de l’empire américain
(4) Zero Hedge, le 1er septembre 2016, Tyler Durden, Hillary’s Approval Rating Plunges To Record Low, Neck And Neck with Trump
(5) La Vigie n° 50, troisième année, le 31 août 2016, Craquements d’été
https://www.lettrevigie.com/2016/08/n-50-craquements-dete-options-pour-leurope/
Léosthène, Siret 453 066 961 00013 FRANCE APE 221E ISSN 1768-3289. |