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25 septembre 2016 7 25 /09 /septembre /2016 11:06
Par Guillaume Berlat 19 septembre 2016

Texte sans les annotations à retrouver sur Proche moyen-orient

 

« Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais ». Traditionnellement utilisée sur le mode ironique, cette phrase, devenue proverbiale, s’applique à propos de quelqu’un qui se dispense d’appliquer les conseils qu’il donne à autrui, selon une acception couramment admise. S’il y a bien un État dans le monde auquel cet adage va comme un gant, c’est bien aux États-Unis d’Amérique. Il convient parfaitement à leur politique étrangère, à leur diplomatie, à leur approche évolutive de la vérité, à leur conception originale du droit, à leur interprétation unilatérale de la mondialisation, à leur morale à géométrie variable, à leur manichéisme redoutable … Toutes choses que les faits objectifs révèlent depuis plusieurs années à celui qui veut voir et entendre.

 

La réalité comporte un réservoir d’exemples au cours des décennies et sur tous les continents dans lequel chacun peut puiser selon son bon plaisir pour alimenter un dossier à charge contre l’Amérique du nord, toutes administrations confondues. « La folie, c’est de recommencer les mêmes choses et en attendre des résultats différents » nous rappelle à bon escient Albert Einstein. Les Américains sont experts en ce domaine (Vietnam, Irak, Afghanistan, Libye…). Il faut le leur concéder bien volontiers cette qualité de constance dans l’erreur. A quelle conclusion parvient-on avec un minimum de bon sens au regard de l’expérience accumulée ? Qu’à trop vouloir jouer le justicier du monde, les États-Unis transforment le monde en injustice.

 

LES ÉTATS-UNIS OU LE JUSTICIER DU MONDE

La vision américaine du vaste monde est simple, pour ne pas dire simpliste. A l’instar des westerns, les Américains se présentent comme le juge partial des relations internationales qui les conduit à en être le cow-boy intraitable.

Le juge partial des relations internationales : les nouveaux Lucky Luke

Aux États-Unis, il n’y a souvent qu’un pas entre leur théorie originale et leur pratique assez peu orthodoxe des relations internationales.

 

Une théorie originale. Oints par le Tout puissant, l’Amérique caracole sur le char de l’histoire affublée d’une « destinée manifeste », d’une mission universaliste : diffuser le bonheur et la paix éternelle au monde entier par son « soft power » (sa langue dominante, ses idées baroques comme « la fin de l’histoire », sa cuisine indigeste, son mode de vie particulier, son cinéma hollywoodien et ses séries télévisées de quatre sous) mais aussi et surtout par son « hard power » surtout contre la volonté des récalcitrants au progrès « made in USA » (Cf. le concept de « Grand Moyen-Orient » développé en son temps par l’administration de George W. Bush). Les Américains pensent que l’histoire du monde, c’est l’occidentalisation (donc pour eux l’américanisation par un raccourci conceptuel) du monde. Le passé ne les intéresse guère. Le présent leur suffit tant il est chargé d’imprévus pour les absorber. Au diable les leçons de l’histoire, y compris les plus récentes.

 

Une pratique peu orthodoxe. Dans une posture morale, les États-Unis décrètent, du haut du Capitole, quels sont les Etats infréquentables devant être mis au ban de la société internationale pour leurs errements er leur refus de se soumettre à leurs Diktats. Ils sont qualifiés du terme peu flatteur « d’États voyous » (« Rogue States ») et sont accusés de former « l’Axe du Mal ». Rien de moins ! Aucun de ces concepts ne figure bien évidemment dans la Charte des Nations unies, étant empruntés au langage religieux et participant d’une approche manichéenne et morale opérant une distinction binaire entre le Bien et le Mal. Il va sans dire, mais cela va mieux en le disant, que Washington ne consulte aucun de ses chers alliés de l’OTAN (ses idiots utiles) pas plus que les membres du Conseil de sécurité de l’ONU (ces empêcheurs de tourner en rond) pour qualifier et tancer ces États. À quoi bon lorsqu’on est omnipotent et omniscient ?

 

Le cow-boy intraitable du « Rest of the World » : les nouveaux Reagan

Tous les États sont logés à la même enseigne ou presque. Il n’y a que la méthode qui change selon qu’on est gratifié du vocable d’ami ou d’ennemi de l’Amérique.

 

Les amis trompés. S’il est normal d’espionner ses ennemis, il est assez peu élégant de le faire pour ses plus proches alliés. C’est bien ce que fait la NSA qui d’écoute sans vergogne une quarantaine de chefs d’État et de gouvernement, y compris en utilisant les ambassades américaines à l’étranger (à Berlin et à Paris) pour tout entendre et tout savoir. La curiosité n’est-elle pas un vilain défaut ? Où sont les excuses et autres mots de compassion ? Vous repasserez dans la mesure où c’est pour votre Bien et pour vous protéger, à l’insu de votre plein gré, du Mal. Mais comment réagissent les dirigeants concernés ? Par quelques borborygmes incompréhensibles. Mais comment réagit l’Union européenne, si fière d’être porteuse de valeurs ? Au pire par un silence assourdissant de sa Commission, au mieux par une résolution dénuée de toute valeur contraignante de son Parlement. Même en prêtant une oreille attentive, le mot sanction est absent de la vulgate à 28. A l’OTAN, les alliés se prosternent servilement !

 

Les ennemis malmenés. L’Amérique a toujours besoin d’un ennemi, d’un diable (la Russie et la Corée du nord) pour cimenter une OTAN moribonde. « Le chaos ambiant est un effet d’aubaine ». Il ne fait pas bon contredire, résister aux États-Unis par les temps qui courent, les temps de la « guerre totale contre le terrorisme ». C’est une vision morale du monde aveugle face à la réalité. Quand on est différent, on attire la suspicion. Comme aurait dit Coluche : « il y a trop d’étrangers dans le monde ». La coercition la plus brutale suit de très peu le rappel à l’ordre peu diplomatique. La démarche coopérative n’est pas dans les habitudes de Washington. Injonction, sanction, punition – le plus souvent sans la moindre autorisation préalable du Conseil de sécurité – sont les trois mantras du remède classique américain aux maux de la terre ! Iraniens, Russes et autres Syriens en savent quelque chose. Ils finiront bien un jour par rendre gorge comme l’EIIL, après Al-Qaïda.

 

A l’usage, on voit bien les dangers d’une vision aussi manichéenne du monde. La vérité apparaît forcément un jour et elle est plus que dérangeante.

 

LES ÉTATS-UNIS OU LE MONDE DE L’INJUSTICE

Rendons à César ce qui est à César. L’Amérique du nord excelle, depuis plusieurs décennies au moins, dans l’art consommé de la manipulation du fait et du droit mais également dans la pratique de l’exportation hors de ses frontières des crises et de la guerre avec le soutien de quelques « idiots utiles » adeptes de la théorie de la servitude volontaire chère à La Boétie.

Le manipulateur du fait et du droit : une grande expertise

 

Une certaine idée des faits. La frontière jusque-là naturelle de la virtualité et de la réalité, du faux et du vrai est abolie. Mais il y a pire encore. Le mensonge est élevé au rang de sport national et plus c’est gros, plus ça passe.  Les États-Unis sont les meilleurs adeptes du mentir-vrai. Chez eux, « les mots mentent comme ils respirent », pour reprendre la formule de Romain Gary. Il faut attendre plusieurs années pour que Colin Powell reconnaisse, confus, que les preuves de la présence d’armes de destruction massive en Irak n’ont jamais existé en dépit de ce qu’il déclarait devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Il faut attendre un rapport accablant de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour que les États-Unis admettent l’existence des vols secrets de la CIA pour transporter des prisonniers vers quelques contrées disposant d’une réelle expertise en matière de torture. Il faut attendre les révélations d’un grand quotidien américain pour que la Maison Blanche reconnaisse le versement d’une rançon en contrepartie de la libération d’otages détenus en Iran alors même que la position officielle est que Washington ne verse jamais de rançons. Il faut attendre la publication d’études indépendantes pour que les Américains reconnaissent qu’ils ne pouvaient avoir tué plus de djihadistes qu’il n’en existait en Irak et en Syrie. Et cette liste n’est pas exhaustive, mais tout simplement indicative ! On croit rêver s’agissant d’un pays qui donne des leçons à la terre entière. Mais, ce n’est pas tout !

 

Une certaine idée du droit. Là encore, on peut dire que les Américains ne manquent pas d’air, eux qui se présentent comme des parangons de vertu en matière juridique tant leur Constitution s’apparenterait aux tables de la loi. Pour faire simple, on peut dire que la conception juridique du droit laisse rêveur les tenants d’un droit international fondé sur le principe de l’égalité souveraine entre États tel qu’énoncé par la charte de l’ONU. D’un côté, le droit américain s’applique en dehors du territoire, jouissant d’une forme d’extra-territorialité. Cela leur permet d’écarter des concurrents commerciaux étrangers trop bien implantés dans un pays. De l’autre, les Américains ont toujours été et sont toujours réservés à l’idée que le droit leur soit applicable comme au vulgum pecus qu’il s’agisse de la Cour pénale internationale, de l’interdiction des essais nucléaires, du droit international humanitaire, du climat…. Cela leur permet de procéder à des assassinats ciblés de terroristes aux quatre coins du monde, de bombarder des hôpitaux de MSF en Afghanistan en toute impunité. Par une curieuse ironie de l’Histoire, l’Amérique récuse aujourd’hui les principes cardinaux de la mondialisation qu’elle a mise sur pied hier dans la mesure où elle ne leur apporterait plus aujourd’hui les dividendes qu’elle en escomptent sur le plan économique, financier et social (Cf. les propositions de Donald Trump et Hillary Clinton). Barack Obama va jusqu’à faire la leçon aux Chinois en matière de droit maritime international !

 

L’exportateur de crises et de guerres et les idiots utiles : une grande expérience

Une exportation des crises. La vie internationale est fondée sur le respect de règles communes souscrites volontairement par les États. Hors, les Américains s’autorisent à s’exclure du droit commun dont ils exigent l’application par le reste du monde. De facto, si ce n’est de jure, ils seraient hors-la-loi. Que de crises exportées par les États-Unis hors de ses frontières au cours des dernières décennies sans qu’ils n’aient jamais eu à en rendre compte devant un quelconque tribunal pénal international ou une cour pénale internationale ! La plus violente est la crise financière née de la bulle spéculative autour des « subprimes » qui a failli emporter le monde à partir du moment où elle s’est répandue comme des métastases. Où sont les coupables ? Ils ont rarement été poursuivis et condamnés comme cela aurait été normal. Que font-ils ? Ils emploient comme consultant « Brexit », l’ancien président de la Commission européenne, José Manuel Barroso sans que personne n’y trouve à redire. Non moins spectaculaire est la crise environnementale qui secoue la planète. Les États-Unis sont, avec les Chinois, les plus gros pollueurs de la terre. Ils ratifient le texte de la COP21 après avoir lutté pour qu’il ne contienne aucun engagement contraignant. Donald Trump annonce qu’il s’en dégagera en cas de victoire à l’élection présidentielle. Ces deux exemples illustrent parfaitement le rôle néfaste joué par les Américains dans la dérégulation et la déstabilisation de la vie internationale.

 

Une exportation des guerres. Dans ce domaine, les Américains disposent d’une expertise incontestable et incontestée. C’est d’abord la guerre au sens militaire que Washington apporte en présent aux peuples ombrageux, peu portés à la servitude volontaire. Une fois l’ordre remis, les États concernés ont le plus grand mal à s’en remettre (Irak, Afghanistan, Libye…) tant les traumatismes y sont profonds. Avec les Américains, il y a une grande chance que le remède soit pire que le mal tant ils ne comprennent rien aux pays dans lesquels ils interviennent. Nous en mesurons aujourd’hui tous les effets négatifs sur la sécurité internationale. C’est ensuite la guerre au sens financier du terme. Les guerres financières Ce sont de vraies guerres qui tuent et paupérisent les peuples, comme on l’a vu en Grèce. Cette situation stratégique inédite s’explique par la nouvelle puissance des acteurs financiers : banques d’affaires, fonds d’investissements, nombreux milliardaires issus de Wall Street. Depuis les années 1980, une finance dérégulée, mondialisée et en partie toxique s’est bâti de vastes principautés immatérielles, surplombant les économies et lançant des raids sur des États captifs et des populations tétanisées. Malgré sa responsabilité dans la crise de 2008, la finance-puissance continue d’étendre son emprise, usant de stratégies empruntant à l’art de la guerre. C’est enfin, le concept de « guerre des civilisations » dont ils sont les exportateurs à travers les thèses culturalistes de Samuel Huntington.

 

Les « idiots utiles ». Le tableau présenté ci-dessus a simplement valeur d’exemple. Il ne prétend pas à l’exhaustivité tant la liste des errements de l’Amérique au cours des dernière années est impressionnante pour celui qui observe la réalité quotidienne avec distance tout en ne méconnaissant pas les succès d’Outre-Atlantique dans les domaines les plus variés. Être allié loyal des États-Unis ne signifie pas nécessairement être son « idiot utile », être aligné sans la moindre réserve, sans la moindre interrogation sur les faits et sur leurs motivations, parfois les plus cyniques ! A cet égard, le retour dans la « famille occidentale » et la réintégration de la structure militaire intégrée de l’Alliance atlantique par Nicolas Sarkozy (que le général de Gaulle avait décidé de quitter) n’ont ni grandi, ni rendu plus forte la France sur la scène internationale. Au contraire ! Elle a affaibli son crédit diplomatique dans nombre de pays du sud. « Pour l’heure, la brouette transatlantique accompagne, en queue de convoi, les pyromanes américains partout où il leur prend l’envie de mettre le feu : le Kosovo, l’Irak, la Libye, la Syrie, l’Ukraine. Leurs voyages sont nos voyages ; leurs conflits sont nos conflits, leurs aventures, nos aventures. C’est la définition même d’un protectorat ».

 

En définitive, sommes-nous conscients de la vacuité des discours américains sur les grandes crises internationales actuelles et passées ? Les seuls discours qu’ils soient capables de tenir pour cacher leur incapacité à comprendre le monde et à agir sont les discours éclairés rédigés par leurs communicants (« spin doctors »). Ceci constitue le signe manifestes de l’emprise de l’empire de la com sur leur politique étrangère et leur diplomatie.

***

« LE MONDE MALADE DE L’AMÉRIQUE »

« Même un égal, lorsqu’il atteint son objectif, cherche à devenir plus fort et, dès qu’il l’est devenu, cesse d’être fiable ». Les lecteurs avertis de Machiavel, Clausewitz et autres Sun Tzu ne trouveront peu de nouveauté dans l’analyse de la position américaine dans le concert des nations, tout juste la confirmation qu’à Washinton la politique a toujours été envisagée avec une méthode froide, cynique, débarrassée de toute morale. En ce début de XXIe siècle, les Américains n’échappent pas à la règle et commencent, lentement mais sûrement, à payer la facture de leur désamour par le « Rest of the World » comme ils le qualifient avec dédain et supériorité. Et cette facture risque d’être lourde lorsque le monde découvrira, le jour venu avec effroi (Horresco referens), qu’il est « malade de l’Amérique ». Comment l’Histoire jugera l’Amérique ? La réponse la plus récente de son vice-président, Joe Biden à cette question est faible, voire risible.

 

Sommes-nous conscients de cet état de choses ou sommes-nous des somnambules ? Sommes-nous disposés à engager un authentique débat sur le sujet ? Pouvons-nous y changer quelque chose individuellement (en tant que France) ou collectivement (en tant qu’Union européenne) ? Le voulons-nous ? Est-ce faisable et envisageable dans un monde frappé au seau du conformisme et du panurgisme médiatique ? En dernière analyse, les États-Unis sont atteints d’un phénomène bien connu des psychologues et autres psychiatres, à savoir celui du transfert dont l’un des deux mécanismes constitutifs se nomme projection. Elle consiste à attribuer à autrui des caractéristiques qui lui sont propres et qu’il refuse en lui. Sans nul doute, et même s’il y a une part d’exagération dans ces paroles, le fond en est juste : États-Unis ou États voyous ?

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